Warning: Cannot modify header information - headers already sent by (output started at /home/gillesbld/www/weblog/inc/config.php:41) in /home/gillesbld/www/weblog/inc/clearbricks/common/lib.http.php on line 222

Warning: Cannot modify header information - headers already sent by (output started at /home/gillesbld/www/weblog/inc/config.php:41) in /home/gillesbld/www/weblog/inc/clearbricks/common/lib.http.php on line 224

Warning: Cannot modify header information - headers already sent by (output started at /home/gillesbld/www/weblog/inc/config.php:41) in /home/gillesbld/www/weblog/inc/public/lib.urlhandlers.php on line 65

Warning: Cannot modify header information - headers already sent by (output started at /home/gillesbld/www/weblog/inc/config.php:41) in /home/gillesbld/www/weblog/inc/clearbricks/common/lib.http.php on line 247
Tag - salon - Embedded weblog

Embedded weblog

Aller au contenu | Aller au menu | Aller à la recherche

jeudi, décembre 9 2010

ARM European Technical Conference 2010

Avec un bon mois et demi de retard ("tout vient à point à qui sait attendre"), il était peut-être grand temps que je m'atèle au compte-rendu de la demi-journée passée à l'ARM European Technical Conference 2010 du 21 octobre, toujours au même CAP15, où je ne suis arrivé en RER C qu'en début d'après-midi. Pas avant parce que boulot, boulot -- qui accessoirement explique aussi le délai de rédaction du présent billet. Pas après parce que les Anglais savent sous-traiter ce qu'ils ne savent pas bien faire : la bouffe (je plaisante, on mange très bien à Londres, seulement jamais pour moins de 30€ -- alors que là, c'est gratuit). Cette année a signé d'ailleurs le retour de la fontaine de chocolat, et ça, il faut carrément le signaler. ARM is great.

Plaisanterie mise à part, c'est déjà l'occasion de retrouver des acteurs d'Anticyp et de former des liens avec des instituts de formation cherchant des compétences logicielles. Si vous êtes un hardeux en quête d'un formateur de qualité, jeune et dynamique, contactez-moi, j'organiserai immédiatement une rencontre avec Marie-Léona Charpentier du service formation (d'autant qu'elle commence à être formée à l'exercice, on a un bon taux de demande pour les formations en embarqué ces temps-ci). Spécialité Linux, cela va sans dire.

Les petits stands sont à peu près stables d'une année à l'autre, mais force est de constater, tout de même, un recul du logiciel ; notamment du côté de la paravirtualisation, absente du paysage. Peut-être un effet anti-boule-de-neige (ça n'aurait pas été un comble, il faisait certes froid mais encore beau, en ce temps-là), puisque dès lors qu'un concurrent n'est pas présent, pourquoi venir ? Et du côté des conf' programmées, à vrai dire, c'était un peu pareil...

Première conférence logicielle : "Making Open Source Development Easier and Faster". Comprendre : Linaro, projet poussé par ARM en consortium pour accélérer l'intégration de Linux en embarqué. J'étais curieux de savoir ce que cela donnait, en vrai, outre l'exceptionnel très-beau site web (tellement rare...) : eh bien, c'est du très sérieux ! 90 ingénieurs, une véritable organisation, issue d'une association de fondeurs regroupés autour de ARM, qui vont s'occuper de gérer kernel, chaîne de compilation et d'autres sujets immédiatement afférents (conso mémoire, debug, etc -- mais le nombre de thèmes considérés est pour l'instant limité, on ne disperse pas inutilement les ressources) pour assurer un support ARM le plus complet possible, et mettre fin aux problèmes de portabilité. En d'autres mots, ils s'occupent de la couche horizontale pour reverticaliser le marché. Une sortie tous les six mois, une ouverture complète sur les travaux menés, mais une structure de type entreprise assez figée tout de même ; pas vraiment communautaire, donc, mais fort utile par exemple pour sous-traiter l'intégration de patch de support hardware dans le noyau (opération qui prend tout de même six mois : on propose, on négocie, on repropose, c'est testé, c'est à reprendre, et finalement, c'est enfin poussé dans l'arbre, travail de longue halène, pas vrai Google ?). Donc, depuis tout ce temps, la première mouture est sortie, avec un beau gcc (avec gdb), un beau noyau et un bel u-boot. Ça promet, et c'était important.

La seconde conférence à laquelle j'ai assisté était sur Android. En fait, ça a rapidement dérivé sur une implémentation native pour faire du hack atroce (mode Frankenstein), avec le nouvel IDE tout-en-un de ARM, DS-5. Ils sont fous ces hardeux.

Mais revenons-en aux stands : plusieurs me disent qu'ils me lisent avec grand plaisir (notamment le CR de l'année dernière), même avec mes manies de name-dropping (mais je me soigne, regardez ce billet) et de longueur indécente. C'est très plaisant, ma jauge de narcissisme monte (je ne dis pas "remonte", puisqu'elle n'a jamais baissé). Bientôt je signerai des autographes. J'interroge à droite, à gauche, pour prendre le poul : ça pousse beaucoup du côté d'Android, mais ça regarde tout de même du côté de Meego (à mon avis, il vaut mieux, parce que le modèle Google a de sérieuses limites), le pauvre WinCE7 ressemble un peu à un chant du cygne : un dernier essai de Microsoft avant de considérer l'abandon du marché, si ça échoue (z'avez vu les pubs pour les téléphones sous Phone7 qui insultent la concurrence ? On n'y fait pas mention de terminal, hum...), mais ne tirons pas sur l'ambulance. On m'a demandé plusieurs fois si nous considérions donner des formations Android, ou si l'on développait dessus : oui, on développe, et bientôt-oui, une formation est en cours de rédaction ; le problème essentiel est surtout de savoir à quel niveau on se place, applicatif/Java/API ou bas-niveau/conférence ARM/attaque au burin.

Je passe d'agréables moments, notamment avec TI (qui a disséminé ses nouvelles Beagleboard sans flash -- cette manie, je ne comprends pas, rendez-moi ma flash !) et ENEA (on parle tourisme économique entre Suède et pays de l'Est sous-traitants -- on n'y fait pas du pr0n, là-bas, mais de plus en plus d'embarqué, pour de "pures raisons techniques", mais il faudra un jour que j'écrive un pamphlet à ce sujet, promis). Comme chaque année, je ne gagne aucun lot au tirage au sort (ce qui est très dommage, puisque cette année j'ai pensé rendre mon bulletin avant le tirage). Par soucis de préservation de la planète, j'ai ramené peu de documentation (ce bon karma amènera certainement quantité de contrat sur plusieurs réincarnations), les slides étant cette année en ligne (à condition de s'enregistrer, tâche hautement pénible quand on reçoit déjà en double les mails sur des boîtes pro et perso, et qu'on voudrait utiliser encore une nouvelle adresse mail...).

mardi, avril 13 2010

RTS10: journée spéciale Linux Embarqué

Après cinq années de visite de ce salon, et pour cette sixième fois, j'ai été conférencier. Francis Mantes m'avait entretenu l'année dernière de sa volonté de monter une sorte d'atelier thématique autour de l'OS libre embarqué. Revu à la baisse, le projet s'est concrétisé en une journée de conférence complète consacrée au sujet, organisée par l'incontournable François Gautier. J'en avais ici-même fait la publicité. Battage aussi par mail qui n'aura pas donné grand chose, ai-je bien eu l'impression, mais ce ne fut pas bien grave : si l'on se disait que les 215 inscrits une semaine avant l'événement ne viendraient pas tous, force a été de constater que le public a été très nombreux. Et il n'est pas même improbable qu'une partie ait abandonné l'idée de s'arrêter pour s'asseoir : car cela était tout bonnement impossible à une trentaine de personnes ! À la louche : entre 80 et 90 "spectateurs". Debout contre les fines parois, au fond, sur les côtés, on s'arrange comme on peut. Dans le public, je reconnais même un collègue et mon ancien responsable commercial de ma précédente boîte !

Pourtant, l'affichage de l'événement n'était pas bien clair : déclaré deux fois (en réalité pour différencier le matin de l'après-midi), avec des intitulés similaires, bien du monde n'avait compris que les contenus seraient différents. En réalité, il y avait donc le matin Colin WALLS pour MENTOR GRAPHICS, Guillaume CHAUSSIN pour WIND RIVER et Pierre FICHEUX pour OPENWIDE ; tandis que l'après-midi ne faisait figurer que Pierre (again) et (enfin) votre serviteur pour LINAGORA (on l'aura deviné). Nicolas NAVET, de l'INRIA, n'ayant en réalité animé que l'après-midi, le matin étant assuré par François GAUTIER.

Colin Walls est très américanisé dans sa présentation corporate : avec son polo, il nous donne une vue d'ensemble très haute sur Andoid, avec des briques de couleur très jolies ; Guillaume Chaussin est pour sa part très francisé, avec son costard-cravate il nous donne un autre vue très haute sur Android. Là où ça devient amusant, c'est que le public posant à peu près les mêmes questions pour l'un et l'autre, à 45 minutes d'intervalle, le discours est tout différent : sur l'usage de RAM (et donc le dimensionnement nécessaire qui en découle), sur la possibilité de détourner la libc pour en faire du "natif" (comprendre du binaire à partir de code C), bref tout ce qui peut intéresser la vie réelle. Questions pertinentes aussi sur la "certification" Google, qui ressemble fortement au business model Apple (avec son iPhone) : l'accès au vivier d'applications (qui fait beaucoup, sinon toute, de la valeur ajoutée) n'est disponible que si la déclaration de compatibilité est statuée ; imaginons un appareil qui dispose de hardware (une webcam, par exemple) nécessitant quelques hooks, nous voilà privé du tampon. Je trouve que pour du libre, c'est compréhensible d'un point de vue industriel, mais ça craint dans l'absolu. Ceci me conforte dans mon idée : j'attendrai MeeGo (c'est cher, un smartphone, avez-vous remarqué ?). Toujours est-il que le succès d'Android est manifestement fulgurant (mais les entraves plaisent au monde industriel, je pense qu'il y a une fonction psychologique de masochisme latent, un jour j'écrirai un mémoire de socio dessus, promis -- enfin, si j'ai le temps).

Je me disais que l'après-midi, personne ne viendrai. Après tout, la présentation de Pierre le matin, sur Qemu, afin de tester sur la plate-forme de développement un système cible (le userspace, en fait, mais justement Pierre a fait pour nous un détour par le kernelspace : OpenWide -- enfin, OS4i, la branche pour l'embarqué -- a utilisé Qemu pour supporter un vieux système faisant appel à du matériellement deprecated pour une couche de virtualisation bien maligne), aurait pu satisfaire les aspirations techniques de l'auditoire. Que nenni : ce fut plus geek, plus roots, plus avide de bas niveau et de goût du silicium. Un public tellement nombreux qu'il y en avait assis dans la travée centrale, d'autres ayant même détourné des sièges pour les ramener sur le côté. Juste impressionnant.

Pierre Ficheux a donc montré l'étendu de son savoir-faire en matière de présentation (mais pas en matière de schématisation ! :)  Il faut lui proposer un DIF pour manier Inkscape, je ne vois que ça), en enchaînant coup sur coup "Comment accélérer le temps de boot d’un Linux" (trucs et astuces au programme) puis "Comment déboguer le cœur Linux" (en l'occurrence avec kgdb et kdb). Qu'il me soit permis de remercier Pierre : il a introduit admirablement bien ma conférence, soit volontairement (avec des "cf conférence suivante par Gilles Blanc" explicites), soit... involontairement, avec le bricolage de debug ou la phrase qui m'a fait bien rire : débugguer en assembleur le kernel Linux, c'est la galère la plus totale. Ce qui est fort vrai, preuve en a été donnée par ma personne juste ensuite.  :)

Il m'a donc non seulement été donné de mener ma première conférence à RTS, mais en plus de le faire après Pierre, ce qui est un grand honneur : la dernière conférence sur Linux embarqué à laquelle j'avais assisté le faisait figurer en bonne place, c'était il en 2007 ce me semble, j'étais tout jeune et dans l'assistance, mais n'en avais pas moins envie de franchir la table des conférenciers. Hasard du sort, mon sujet s'est donc porté sur de l'ultra-geek (tandis qu'habituellement, en conférence, je donne exactement le contraire : état des lieux du marché, stratégie de mise en place de Linux, pertinence, etc, le tout pour un large public) : comment utiliser le câble J-Tag du pauvre (sinon, on parlerait de "sonde") pour débugger sur le pouce un Linux récalcitrant, et ce dès le démarrage (c'est-à-dire que l'on n'a même pas de log en console, ou une console inopérante, et peut-être pas même encore de MMU).

Mes lecteurs depuis les débuts (ou presque) de ce blog auront sans doute reconnu mon aventure de 2008, que j'avais conté en deux parties. En version simplifiée sur slides, ça donne du burlesque, et je suis fier de vous annoncer que seulement une quinzaine de personnes ont abandonné en cours de route. Denis Bodor, rédacteur en chef de GNU/Linux Magazine France (dont le dernier numéro hors série sur les systèmes embarqués est excellent -- à ce propos, Pierre a reçu un mail de remerciement pour son article sur Buildroot, qui a sauvé des vies : pourquoi ne reçois-je rien dans ce genre, moi, hein ?), et qui a du fond de la salle assisté à ma présentation, m'a révélé que plusieurs personnes se disaient entre elles que dans la vraie vie, c'est souvent comme ça que ça se terminait. Avec la méthode scout. D'ailleurs, à la fin de ma conférence (et donc de la journée spéciale Linux embarqué), après ma démonstration (qui a marché du premier coup !) consistant à "rediriger" les logs, normalement envoyés sur le port série, sur la console gdb via le J-Tag, un petit groupe d'intéressés s'est formé, et entre ceux qui dessoudent au briquet et ceux qui soudent du FPGA à l'étain, on s'est retrouvés un peu bête. On trouve toujours pire que soit (surtout chez les hardeux).

Mais revoilà que je suis trop long (quoique cette fois-ci, comme on m'a beaucoup pressé, j'ai terminé à l'heure !). Voici donc les slides : bonne (re)lecture !

jeudi, avril 8 2010

RTS2010

Très bon cru pour cette session 2010 du salon RTS. Certes la période des années 2000 est définitivement résolue, et le hall 8 de la porte de Versailles pour être rempli fait toujours appel aux pendants M2M (communications de Machine à Machine) et Display (composants d'affichage). Les grands stands privatifs d'exposition ont disparu, mais les groupes étrangers de matériel ont fait leur apparition ; note pour les Chinois : de grands sourire et l'air avenant sont nécessaire en Europe ! Déjà que l'on présage avec appréhension une séance d'Anglais baragouiné pas bien constructive, la bonne vieille méthode de la jolie communicante a aussi toujours son succès ; même si son taux a très fortement décru aussi. Petite aparté sur la parité : c'est hautement catastrophique, dans les allées, dans les salons, sur les stands (où c'est forcément beaucoup mieux), c'est juste pire qu'avant ; compter à la louche 5% de représentation. Autre disparition aussi : les quelques rares sociétés de service (je pense notamment à Teamlog, l'année dernière, qui avait une jolie démo sur son stand, pas assez aguicheur à mon avis) ; je n'en ai compté qu'une seule, proposant de l'offshoring en Tunisie. Mais dans l'ensemble, c'est une sacrée réussite, et il faut saluer le travail d'organisation de Francis Mantes (rapidement croisé, l'appareil photo à la main).

Comme d'habitude, WindRiver avait l'entrée du salon, et NI le stand le plus grouillant de T-shirts corporate devant des démos attirantes : le pendule inversé existe donc bien en dehors des TDs Matlab de cours d'automatique... À ce propos, Matlab n'était pas présent cette année, donc Polyspace non plus, et son concurrent Coverty ne s'est pas plus déplacé (adieu le goodie de l'année !) ; ne restait plus que Emenda, comme micro-société distributrice de solutions de logiciels de couverture de code. Des cartes électroniques sont suspendues ou sous cloche un peu partout, et l'on compte presqu'autant d'Atom que d'ARM, même si à la discussion, c'est toujours les Anglais qui gagnent. À ce petit jeu, WindRiver reste tout autant agnostique que pour le non-choix entre Moblin (Intel) et Android (Google) : on se rappelle qu'ils ont été rachetés par Intel au moment où ils nous parlent de la prochaine génération d'Atom dans les cartons (Morse, si mes souvenirs sont bons). Rachetés aussi et disposant cette fois d'un stand indépendant, contrairement à deux ans auparavant où ils squattaient Neomore (toujours présents, non loin d'Anticyp), Trolltech devenu Nokia (la marque norvégienne s'est totalement effacée, mais les bureaux n'ont pas déménagé en Finlande) faisait figurer les deux même Français expatriés, et présentant une solution Qt 4.6 au succès largement plus important : voilà un rachat qui a eu du bon pour eux. Leur conférence, à 13h, le second jour du salon, a aussi connu un franc succès -- cependant, les informations réellement trépidantes ont été un peu absentes, surtout lorsqu'on apprend que le projet MeeGo, fusion de Moblin et Maemo mais sur du Qt, est très très loin d'être prêt).

L'intéraction sur les stands était fort constructives, et si aucune affaire immédiate n'a pu être rapportée -- nous sommes sur un salon de vendeurs, c'est assez logique, il faudrait son propre stand pour cela, et je ne suis pas bien certain, vu le succès des fournisseurs de service, de la pertinence par rapport au public industriel assez prudent --, des partenariats très intéressants sont clairement à attendre. L'avenir dira. On constate par ailleurs le problème récurrent de mauvaise vision des "partenaires" (ou concurrents, plutôt) entre eux, tout clairsemés qu'ils sont au quatre coins de la France, si ce n'est du monde, et ne navigant pas eux-mêmes dans les allées -- à l'exception de quelques uns, par ailleurs très notables. Passons à la page publicité pour ceux à qui j'ai promis de parler ici, parce qu'ils le méritent, parce qu'ils m'ont fort bien accueilli, ou parce qu'ils m'ont fortement intéressé.

Tout d'abord, un petit erratum pour Greenhills (à l'équipe toujours aussi sympathique), puisque dans mon précédent compte-rendu j'avais totalement fourché sur un paragraphe, à présent corrigé ; je précise au passage que seul le Pape est infaillible (sous certaines conditions, qui plus est), et je peux donc écrire des bêtises scandaleuses, que vous pouvez me pointer en commentaire ou par mail (ceci dit, s'en rappeler un an plus tard était impressionnant de la part de Serge Plagnol !). Ensuite, je voudrais attirer votre attention sur un jeune entrepreneur ayant réalisé (en PyQt !) un logiciel de création de Linux embarqué du même nom que la distribution ainsi obtenu : Yaeld (Yet Another Embedded Linux Distribution : on est geek ou on ne l'est pas). Basé sur OpenEmbedded, l'interface est extrêmement intuitive, et permet de paramétrer très finement le projet sur-mesure. Reste à sortir une version définitive du projet (très prochainement, si ce n'est déjà fait) et à arriver à le commercialiser : c'est-à-dire à se faire connaître (j'y participe) et à convaincre qu'un tel outil fait facilement gagner une semaine de production et quelques arrachages de cheveux, soit de quoi justifier un investissement de quelques milliers d'Euros. Je souhaite bonne chance à notre héros breton Thomas Jourdan. Enfin, un petit mot sur AcidOS (attention : site moche), micro-kernel très innovant, écrit from scratch sur un modèle L4 mais bien plus optimisé (en se débarrassant de la couche POSIX), pouvant relancer des services à la volée en faisant migrer la mémoire virtuelle : en cas de détection d'instabilité ou de faille de sécurité (ce sont des anciens de Hackademy, m'a-t-on dit), le service kernel (en mode protégé) peut être ainsi relancé à chaud au prix d'une interruption de service imperceptible. Quand on sait qu'à la manière d'OKL4, un service peut être une paravirtualisation de Linux, voilà qui est tout à coup extrêmement intéressant ! (en outre était présente sur le stand à l'ambiance fort sympathique, la plus agréable des expertes en café qu'il m'ait été donné de rencontrer)

La seconde journée était consacrée pour ma part (et celles de beaucoup d'autres !) aux conférences de la journée spéciale Linux Embarqué. Un compte-rendu est donc à venir dans un prochain billet. Le temps que je rajoute une licence à mes slides, pour commencer...

mardi, décembre 22 2009

ARM European Technical Conference 2009

Comme l'année dernière, et certainement celles d'avant (j'avoue ne pas connaître les origines exactes de l'événement), avait lieu en ce jeudi 10 décembre passé l'ARM European Technical Conference (AETC pour les intimes) 2009, au même lieu que l'année dernière, CAP15 près de la tour Eiffel. J'arrive très tôt (pour moi) mais manifestement, beaucoup de monde a son rythme de vie câlée sur nos amies aviaires, et la grande salle de conférence est déjà bien garnie. On y parle Anglais, comme toujours dans les conférences de cet événement réellement européen -- comprendre qu'il y a quantité d'Allemands (patron, ma formation de langue !), d'Anglais, et quelques Russes --, mais la langue véhiculaire laisse plus souvent que l'année dernière au vernaculaire sur les stands du forum voisin -- je n'ai pas pris de photo, mais l'organisation était tout aussi semblable qu'en 2008. Pour les personnes présentes qui passeraient sur ce compte-rendu, puisque chez Anticyp on m'a dit être déjà venu me lire, et qui ne me remettrait pas, j'étais tout de gris et violet vêtu, un chapeau sur la tête (quelques commentateurs, mais pas des plus fins, s'inquiétant régulièrement sur ce point).

Comme je ne pense jamais trop aux mékeskidi, et que chez Linagora, certains administrent des réseaux ou mettent en place des messageries, bref n'ont rien à voir avec l'embarqué mais trouvent peut-être ma prose intéressante, je rappelle donc que ARM est la société anglaise à l'origine du microprocesseur du même nom, que l'on trouve décliné sous différentes gammes depuis une vingtaine d'années dans tellement d'appareils embarqués, qu'il ne fait aucun doute qu'ils dominent le marché (et x86/Intel, me direz-vous ? Comptez le nombre de téléphones portables par foyer ; puis le nombre d'ordinateurs ; vous y êtes). ARM possède cependant une spécificité : ils ne sont pas fondeurs, comprendre qu'ils ne vendent pas directement des puces ni aucune sorte de hardware, mais seulement de la R&D pure, autrement dit pour les fondeurs que sont ST, NXP, TI ou ATMEL, pour parler des présents, il s'agit de récupérer des plans -- pour simplifier. La cible est néanmoins déterminée : il ne s'agit pas de grosses infrastructures réseautiques (plus propices à être sous PowerQUICC/PPC voire x86), ni de microcontrôleurs extrêmement simples de style PIC/68k (qui cèdent, certes, devant le Coldfire, dont on peut se demander si ARM ne gourmande pas par anticipation les parts de marché avec son dernier né, le Cortex-M3, mais je m'avance), mais il n'empêche que d'une cible de CE (Consumer Electronic), représentée sur le diagramme final par le "1 milliard de téléphones", la compagnie lorgne du côté des nouveaux mini-PCs (tout une histoire marketting, ce machin-là) avec 100 millions d'unités visées, et vers les "specialized devices" à hauteur de 10 milliards d'unités (une paille). Le démarrage en flèche du Cortex-M3, tout minuscule qu'il est (visible sur l'un des nombreux stands éparpillés d'ARM), destiné par exemple à être embarqué dans des montres, tendrait à soutenir cette espérance.

Malgré la crise, ARM va bien, et le fait savoir (quand bien même il n'y avait plus de fontaine au chocolat cette année -- mais le buffet était excellent, mes compliments au traiteur et à son équipe dévouée). Une slide montrant le foisonnement des microprocesseurs disponibles il y a une bonne quinzaine d'années, et de ce qu'il en reste en comparaison, fait l'impasse sur SH4 (pourtant très présent dans les STB et autres lecteurs en tout genre), sur SPARC (pourtant certaines archi intéressent le spatial -- ok, ça n'a pas empêché les CPUs de Thomson de défunter) ou sur PPC, montrant une promptitude à enterrer la concurrence qui m'a quelque peu amusé -- je n'ai pas eu le temps de demander sur le stand de ST ce qu'ils en pensaient... En fait, le concurrent principal Atom n'a pas droit de cité non plus. Et ça c'est vraiment méchant -- et pas forcément pertinent, mieux vaut prendre l'adversaire à bras le corps que de l'ignorer, en tout cas dans la bataille on sait où mon coeur va.

Il est beaucoup question de communauté, non pas libre mais autour de ARM, naturellement : par exemple, pour l'extension 3D Mali, le site malideveloper.com partage les informations plus simplement entre développeurs (le marché étant assez récent de ce côté, mais néanmoins à pente rapide comme on peut le constater en considérant les consoles de jeu video portables ; le vrai challenge pour ARM est clairement désigné : le multimédia et notamment la télévision, en concurrence frontale avec SH4) ; on évoque mbed.org, "rapid prototyping for microcontrollers" ; ou encore le projet plugcomputer, qui se donne d'agréger (le concept est un peu flou, je trouve) les idées de serveur miniature de "domotique" (le mot est devenu quelque peu tabou, à force), dans le style DLNA, connectivité centralisée à but applicatif, etc. En fait, remplacez le fameux "developers developers developers" de Ballmer par "community community community" : c'est le nouveau maître-mot. Désenclaver le développeur, mais aussi le décideur (cf la multiplication des blogs pro), voilà une idée qui a l'air aussi bête qu'évidente, mais qu'aucun ne s'était attelé à mettre en oeuvre jusqu'à présent. Si l'on considère la récente communauté autour de Montavista (meld), on voit bien que le mouvement est amorcé : c'est à qui fédèrera le plus autour de lui, en offrant comme valeur ajoutée un partage de connaissance. Ça ne vous dit rien, comme fonctionnement ? Linux embarqué, ce n'est pas seulement un OS gratuit qui entre dans le paysage, je ne cesse de le répéter, c'est l'arbre qui cache la forêt du libre dans l'embarqué, techniquement et dans la pratique : c'est une nouvelle façon de penser, de concevoir, par le partage (d'information pour le moment, mais le code commence à venir, voyez la suite), mot totalement inconnu jusqu'alors dans le monde industriel. Ça fait du bien.

Linux est un mot qui revient souvent, et que l'on trouve décliné sous les formes "Ubuntu" ou "Mozilla" (bon, on sait ce que j'en pense...). Mais ce qui revient encore plus, c'est Android, et Chrome. Le premier, on commence à le connaître, son succès, surtout depuis la dernière version, est impressionnant, et il ne faut pas s'étonner de le voir partout où l'environnement est pensé pour du fenêtrage simple, c'est-à-dire une application à la fois sur l'écran. Pour le multi-fenêtrage, ARM nous parle de Chrome : et là, j'avais raté un épisode. ChromeOS a été montré le 19 novembre dernier, et en fait, c'est l'une de mes prophéties qui se réalise (je suis meilleur que St-Jean le Baptiste, d'une manière générale, je fais donc attention à ne pas perdre la tête) : la migration de l'OS vers du tout-web, ie l'interface graphique utilisateur entièrement conçue à base de technologie web de type html/javascript, rendues par un navigateur puissant mais léger. C'est une question de logique : le but (dans lequel s'inscrit parfaitement Linux, qui est d'ailleurs le kernel sous ce ChromeOS) est d'abaisser le ticket d'entrée dans le monde de l'embarqué, et de le rendre plus fonctionnel ; fini les interfaces toutes pourries et obscures en assembleur et en frame buffer ! La montée en puissance (phénoménale) du hardware pour une consommation en énergie toujours meilleure sert exactement ces intérêts. À travers le logiciel, c'est l'utilisateur qui est remis au centre du problème. D'où la conclusion que je retiens : "Software is all about now", "software ecosystem decides !". La fin annoncée de l'électronicien raté, et l'arrivée du monde logiciel en position de force.

Après toutes ces bonnes nouvelles, place est laissée pour l'orateur suivant, qui nous parle d'un consortium rapidement identifié par mes soins comme du lobbying de hardeux, ce qui ne m'intéresse guère (on sait le milieu assez doué en la matière, parfois trop). Je migre donc vers les stands : passage chez -- ne riez pas -- Windows Embedded Business Group Microsoft France (toujours sur son WinCE 6.1, qui commence à dater, mais se voit affublé de service packs -- c'est une manie !), qui me donne gentiment une version de Windows Embedded 2011 (3cd : 32bit, 64bit et le toolkit), qui contrairement à XP standard est encore supporté quelques années ; entretien chez Montavista, qui distribue de la belle documentation sur son tout nouveau MontaVista Linux 6 (j'ai raté Maxime Petazzoni, dont je n'ai été au courant de la présence qu'à son appel en fin de journée pour gagner une mini-console de jeu, mais il était déjà parti !) ; et puis Ubuntu, qui présentait un petit PC de poche à clavier et écran tactile (dans les deux cas, mes doigts de pianistes étant déjà un peu trop gros : c'est pour le marché japonais, aussi...), de chez Sharp il me semble, sympathique mais à mon avis beaucoup trop geek, il n'y a qu'à considérer les parts de marché du N800, plus sexy quoique moins fonctionnel (mais plus réactif, en échange) -- côté software, en revanche, l'intégration est très bonne, mais firefox bouffe presque toute la mémoire, le menu convivial sur le bureau buggue encore un peu (ce n'est pas une version définitive qui était montrée), et parfois la machine freeze...

Tout le long de la journée, il y a aussi les sessions de conférences, quasiment toutes données par des gens de ARM, ou plus vastement de Keil, la partie software rachetée il y a maintenant un bon bout de temps : il ne faut alors pas s'étonner que lors du track32 "Advanced Debug and Optimization of Cortex-M processor-based Systems", on ne parle uniquement de la sonde J-Tag et des outils Keil, et nullement du JtagX ou autre sonde WindRiver que l'on vante tout aussi bien sur les stands d'Anticyp ou de Neomore. J'avoue sur la journée avoir moins assisté aux conférences que l'année précédente, ayant privilégié cette fois les stands -- sans pour autant avoir pu tout visiter, de ce qui aurait pu m'intéresser. C'est ainsi que je découvre MVD Training, dont le site affreux prouve bien qu'il s'agit de barbus de l'embarqué très bas niveau, et si l'on se fait concurrence sur les formations Linux embarqué/drivers, le reste est tout à fait complémentaire (notamment en terme de programmation), et l'offre assez unique à ma connaissance sur les formations très bas niveau (microprocesseur particulier, programmation, et au milieu : VHDL) me fait penser que mon DIF est plein à craquer (message subliminal).

Et puis je passe beaucoup de temps sur le stand Texas Instrument (Angleterre et Allemagne), pas seulement parce qu'ils possèdent la plus charmante des communicantes qui m'ait été de rencontrer (ciel, une Anglaise blonde -- immigrée en Allemagne --, je n'aurais jamais cru, si on peut lui donner mon URL, puisqu'elle doit manifestement savoir lire le Français, que l'on n'hésite surtout pas !), mais parce que ce sont des personnes extrêmement agréables et Elizabete De Freitas (TI serait-il un avant-goût du paradis ? Des femmes aussi sympathiques que belles...) ne met pas longtemps, alors que je lui explique un projet, pour m'offrir une beagle board ! (que j'ai failli me faire dérober à la station Tour Eiffel, mais après avoir piqué une gueulante monumentale sur les pickpockets, ils ont bizarrement fini par retrouver mon objet) Autant dire que ce geste me touche beaucoup, et à présent, je cherche du temps pour m'impliquer dans le support de la bête, le problème principal étant pour le moment de chercher comment en sortir une console (c'est très bête, mais brancher un video proj sur la sortie S-Video me semble un peu compliqué pour bosser, et monter un RS232 va nécessiter un passage en magasin d'électronique et une séance de soudage : autant dire que ça attendra après les fêtes, puisque je serai... en Allemagne).

J'arrête ici mon compte-rendu par anticipation de bonne résolution pour l'année prochaine : faire plus synthétique. Et puis surtout, parce que je suis en vacances dès demain. Enfin, parce que je n'ai pas encore reçu les slides (par mail, nous a-t-on dit, attention, ça veut dire "courrier" en anglais -- en ricain, ça aurait donné "snail mail", désambigüisé --, on se laisse toujours avoir...  :)   ), de fait il est plus difficile de tout se rappeler (et comme l'année dernière je m'étais ruiné la santé à prendre un maximum de notes, alors que j'avais ensuite reçu le CD complet...). Bref, je vous souhaite de bonnes fêtes, plein de beagle boards sous le sapin (non, je ne suis pas sponsorisé, juste un peu corrompu -- et puis la concurrence n'est pas facile à débusquer, alors même qu'on m'en a parlé), et j'espère bien me rendre à l'AETC 2010 l'an prochain !

mercredi, août 19 2009

2ème Assises franco-allemandes de l'Embarqué 2009

Plus de deux mois sans bloguer, et pourtant, chers lecteurs, je vous devais un long commentaire depuis un bon bout de temps. C'est qu'entre les projets qui font courir, et les vacances pour compenser (que la nature est bien faite !), on ne voit guère le temps passer. L'exercice de ce compte-rendu détaillé et commenté va donc se faire avec mes notes plus qu'avec des souvenirs très précis, je m'excuse de fait par avance pour les erreurs qui pourraient s'y glisser, et invite à les signaler en commentaires. Voyageons donc quelque peu dans le temps : mardi 9 juin 2009, 10h du matin ; et dans l'espace : ministère de l'économie, de l'industrie et de l'emploi, centre Mendes France, tout au bout des bâtiments de Bercy. Un site web, un temps trop court pour s'inscrire -- pas très grave, "Linagora", annoncé-je pour la création du badge, et alors que j'épèle par réflexe, "c'est bon, Zapolsky, on connaît !" (ça fait plaisir).

Les assises franco-allemandes de l'Embarqué fêtaient là leur second anniversaire ; l'événement est jeune, il a pour but de renforcer les liens industriels et commerciaux afférant au monde de l'Embarqué entre les deux pays leaders en Europe -- et fort bien placés dans le monde. L'Allemagne est le pays des plus au point sur ce secteur, il n'y a qu'à arpenter des salons ou consulter les chiffres pour s'en apercevoir ; héritage d'une tradition industrielle, et d'une culture de la recherche et du développement certainement. La France en réalité est moins au point, mais dispose d'une industrie militaro-industrielle génératrice de "dynamisme" -- même s'il est artificiel, puisqu'essentiellement soumis au bon vouloir du ministère de la Défense, qui passe commande et "investit", pour aller vite, les retombées se faisant sentir jusque dans les branches civiles ensuite. Il faut cependant bien arrêter le sujet principal : il s'agit avant toute chose de parler informatique, ce qui en l'occurrence intéresse au plus haut point Linagora (ce n'est pas comme si l'on était entre hardeux). D'ailleurs, les deux partenaires de chaque côté du Rhin sont d'un côté le Syntec informatique, et de l'autre BITKOM, qui pour ceux qui ne connaîtraient pas est l'Association Allemande pour les Technologies de l'Information, des Télécommunications et des Nouveaux Media, représentant plus de 1300 entreprises en Allemagne, dont 950 membres génèrent un CA de 135 milliards d'Euros.

Les participants sont accueillis par le p'tit dej' habituel (tellement que j'ai pris le mien chez moi, zut, j'aurais dû y penser, voilà une occasion de moins de rentabiliser mes impôts), et l'amphithéâtre consacré est très agréable (désolé, j'ai oublié de prendre des photos). Je retrouve un ami (qui est celui-là même qui m'a appris l'existence de l'événement) en la personne de Patrick Foubet (qui tient sa propre boutique), par ailleurs collègue professeur à l'INSIA (et voisin dans le civil, c'est dire l'accumulation des coïncidences, puisqu'il enseigne Linux Temps Réel, et moi Linux Embarqué). Nous commençons par une allocution, non pas par Luc Châtel, qui était encore à cette époque le secrétaire d'État chargé de l'Industrie et de la Consommation, auprès de la ministre de l'Economie, de l'Industrie et de l'Emploi, en plus d'être porte-parole du Gouvernement (mais pas de l'Industrie cette fois), mais par l'un de ses hauts-fonctionnaires de cabinet, le conseiller technique Michaël Reynier. Las, n'est pas politique qui veut, le discours est poussif (et plutôt creux), et l'on manque à plusieurs reprises de sombrer. Heureusement, ça ne dure pas bien longtemps, et Eric Bantegnie prend la parole à 10h30 (le planning est respecté à la minute près toute la journée, saluons la précision !), pour nous exposer la "feuille de route franco-allemande pour le développement des Logiciels & Systèmes Embarqués".

Le Président du Comité Embarqué de Syntec informatique (je note le poste pour une future carrière ; il est PDG d'Esterel, tout de même, ce n'est pas gagné) est un bon orateur, et nous présente le CG2E, club de donneurs d'ordres, regroupant le pôle de compétitivité System@tic, l'Aerospace Valley, Minalogic, ainsi que Image et réseaux clusters. Il nous parle de CTB, qui mis à part son homo-acronynimie malheureuse, signifie "Common Technical Baseline" (for embedded systems), et qui à travers son site web nous fait connaître l'avancée des travaux entre grands pontes (Français, Allemands et Néerlandais très essentiellement) pour se mettre d'accord sur un langage commun de spécifications de leurs besoins. Comme un petit peu à chaque fois, le site est moche (sans compter les redirections internes vers soi-même mais avec une racine d'url différente, comme on aura pu constater avec le lien précédent), plutôt vide, et finalement, il reprend juste ce qui existe déjà -- c'est-à-dire la mode des empilements de briques, avec ou sans flèches, qui sont souvent plus une vue de l'esprit qu'un reflet exact de la réalité, noterons-nous narquoisement. Mais il faut saluer l'effort (c'est nouveau dans le métier, qui a su conserver un esprit "maison" de réinvention de roue perpétuelle remarquable).

Son alter-ego germanique Knut Degen, présent du Comité Embarqué de BITKOM, nous parle un peu en français (et surtout en anglais, de mémoire), sur un autre genre plus avenant. Il lance à 10h50 la présentation et restitution des travaux du CG2E, "Club des Grandes Entreprises de l'Embarqué", par Dominique Potier (secrétaire général) et Jean-Claude Derrien. La CG2E comporte actuellement 25 à 30 entreprises, nous apprend-il, des petites, des PMEs et des grandes entreprises (surtout, à mon avis, avec en plus les moyennes débrouillardes habituelles que l'on retrouve un peu partout), et reste ouverte à l'adhésion de nouveaux membres. Son président (temporaire -- peut-être ne l'est-il déjà plus ?) est Dominique Vernay. Concernant l'administration et les finances, c'est le club des partenaires de la FIEEC qui s'en charge. Sont cités aussi parmi les importants Claude Lepape de Schneider pour Minalogic et Gérard Lardier d'Airbus pour l'Aerospace Valley.

Il existe différents groupes de travail : les normes et standards (J-C Derrien de SAFRAN et Eliane Fourgeau de Geensys), la productivité/qualité et le dimensionnement des enjeux économiques ; plus tard on évoquera la SG2 pour la sûreté de fonctionnement. Pour qui se rappelle du salon ARM, nous sommes dans le vent, les préoccupations sont habituelles. Notons que le libre dans l'embarqué s'inscrit exactement dans ce genre de questionnements : l'ouverture des standards (un point sur lequel j'insiste toujours en cours, qui pourtant n'a jamais eu à chercher partout un chargeur pour sa version de téléphone portable ? Ça en est d'ailleurs enfin fini de ce temps, le micro-USB est devenu la norme auto-imposée), la réduction du Time to Market, ou la qualité et la pérennité du code. D'ailleurs, pour qui se remémore les sujets abordés de manière assez récurrente au dernier salon RTS, la sécurité de fonctionnement dans le libre est un point épineux auquel on pense de plus en plus à s'attaquer. Sur tous ces sujets, Linagora a clairement une carte à jouer, par sa connaissance du monde du libre qui l'avantage (ouf, je n'y suis pas allé pour rien :)  ).

À 11h20, Knut Degen, président du comité embarqué de BITKOM, présente une restitution de l'étude BITKOM sur le marché allemand de l'embarqué. Autant dire que ce genre de prise de température de fort bonne qualité est toujours très appréciable. L'industrie embarquée en Allemagne représente un chiffre d'affaire de 19 milliards d'Euros, répartis selon 15 milliards pour les industriels, et 3,7 milliards pour les éditeurs. Si le hardware est environ deux fois plus important que le software, la prestation de service représente sur le camembert de répartition 44% de cette masse financière ! Les télécoms y sont bien plus importants que l'automobile, largement devant la défense (pour d'évidentes raisons) ; ceci est très différent de la France, précise-t-on. On note que l'automobile est tout de même au final le plus important, car en bout de chaîne (c'est de là que partent les commandes). 70% du CA est interne, 17% de l'UE. L'étude s'est aussi intéressée aux problématiques actuelles qui occupent les industriels : la réduction du TTM est bien devant la qualité, suivie des standards et de la complexité, assez devant la sécurité, plus loin l'OpenSource, et enfin en bout la chute des prix. Les secteurs de croissance attendus sont essentiellement le médical (très en vogue, nous le verrons d'ailleurs plus tard), la communication, les machines (spécialité très germanique) et l'électronique de transports (hors l'automobile, apparemment).

On remarque qu'il y a malheureusement peu d'Allemands cette année dans la salle -- l'année dernière, bien du monde avait les écouteurs de traduction sur les oreilles, me confirme mon voisin. On espère qu'il y aura en revanche des français à Francfort (c'était en juillet, apparemment, des nouvelles ?). Et l'on attire l'attention sur l'Embedded World à Nuremberg -- qui est il me semble le plus grand salon mondial du genre. À 11h40, séance de questions, on apprend que l'adhésion à la CG2E coute 1000€ par an, soit une somme assez faible dans l'absolu mais suffisante pour faire un tri à l'entrée, et qui donne toujours à mon avis assez de budget pour payer le stagiaire qui a conçu le site web, puisqu'en terme de fonctionnement l'association ne doit pas avoir grande dépense à faire. On se plaint que pour le médical, le marché est clos et l'on manque d'interlocuteurs : c'est tout à fait vrai. Le SYNTEC permet une comparaison avec nos voisins outre-Rhin en dévoilant qu'il y a deux fois plus de prestations dans notre pays, et que les éditeurs (hors électronique) génèrent un CA de 4 millions d'Euros. La crise va avoir comme impact de réduire une croissance de 12% à 5%, mais les chiffres sont avoués (ou désavoués) comme étant peu précis. On note cependant une inertie du marché de l'embarqué (bien propre au milieu industriel) : c'est mal parce que les adaptations rapides sont difficiles, c'est bien parce que ça empêche de tomber dans les affres de l'économie mondiale. L'Allemagne continue ainsi de vouloir embaucher massivement, ils leur manqueraient 200 à 250 mille ingénieurs !

Justement, à 11h50 est prévue une conférence sur les filières de formation aux métiers de l'Embarqué : "Adéquation entre les besoins en compétences en informatique embarquée et l'offre de formation ?", se demande-t-on. C'est Jean-François Lécole, PDG fondateur de Katalyse qui présente l'étude, menée conjointement avec Merlane pour le compte de l'OPIIEC (Observatoire paritaire des métiers de l'Ingénierie, de l'Informatique, des Etudes et du Conseil, on peut trouver les liens vers le rapport sur la page liée du CICF). Des chiffres : 220.000 emplois, répartis pour 65% chez les industriels, 29% chez les prestataires et 6% chez les éditeurs ; un besoin de 34.000 emplois supplémentaire (en solde net, c'est-à-dire corrigé des départs à la retraite) en cinq ans se fait sentir, pour une progression de 46%, et une répartition de 19.300 (en plus de 26.000 remplacements) dans les SSII et 14.600 (en plus des 48.000 remplacements) dans l'industrie ; 85% des profils sont généralistes, à qui l'on demande des capacités d'évolution en compétences techniques, d'adaptations importantes, et de gestion de projet. Aussi, les formations disponibles sont triés selon trois profils : 500 à 700 nouveaux entrants par an ont bénéficié d'une formation dédiée (260 à 420 en bac+5) ; 17.700 par an (dont 7.700 en bac+5) on suivi un cursus généraliste avec "coloration" embarqué ; et enfin 28.000 sortent d'un cursus scientifique bac+5 (comprenant des physiciens de cursus universitaires par exemple).

L'offre de formation est encore très jeune, et il existe un problème de prévision sur 6 ans ! En tant que professeur et ancien élève, je peux confirmer que le maintien d'une spécialisation en informatique embarquée au sein d'une école, surtout au regard des difficultés spécifiques de la filière (professeurs difficiles à trouver et à faire venir, très grandes variétés des matières souvent très/trop techniques donc spécifiques, problématique de la mise en pratique, et pour finir... très peu d'étudiants s'inscrivent spontanément dans cette spécialisation exigeante), est un problème récurrent. Prévoir une formation qui soit assez générique pour préparer à l'acquisition de technologies non encore existantes au début du cursus, tout en maintenant assez de cours techniques poussés afin de permettre une entrée rapide et sans douleur sur le marché du travail n'est pas de tout repos. On constate aussi, reprend notre conférencier, une forte évolution, des liens avec les laboratoires et une mutualisation. L'offre académique reste cependant pauvre, mais il y a peu de demandes aussi ; la formation continue, quant à elle, marche mieux dans les grandes entreprises.

Les besoins sont pourtant pressants : 12.800 travailleurs pour 3.400 non-ingénieurs, et 9.400 ingénieurs. La demande constatée y correspond à peu près : 12.500 pour 3.900 non-ingénieurs et 8.600 ingénieurs. À cela s'ajoutent 29.750 profils "expérimentés", pour arriver à un total de 42.500. La répartition selon nos trois critères précédemment énoncés se fait alors selon : 20% de formation dédiée, 70% de "coloration" et 10% de non-spécifique. L'avantage des ingénieurs se situe dans la gestion de projets, les langues et la meilleure adaptation au monde du travail que les cursus universitaires. On soulève enfin un dernier point, et non  des moindres : le problème d'image pour les étudiants. Il existe aussi un manque de visibilité des formations (y compris pour les DIF, je rappelle au passage que Linagora propose des formations à Linux Embarqué et Linux Temps Réel, ainsi qu'aux sujets afférents) : une page dédiée sur Internet devrait être créée. On remarquera cependant que l'on n'est pas encore sorti de l'auberge : sans aucun suivi par mails à la suite de ces assises, je trouve les slides de cette conférence sur le site gouvernemental de la partie "technologies de l'information et de la télécommunication" du MINEFI, qui arrive à me faire trouver une référence plus longue sous forme de compte-rendu (non relié au site principal de l'événement, mais qui y renvoie tout de même), qui lui-même ne référence apparemment pas les slides précédents. Bref, aucune idée d'où en est la création du site web sur les formations...

La séance des questions/réponse ne s'attarde pas trop, et en fait un certain nombre de personnes veut plutôt parler de manière informelle avec les intervenants. C'est ainsi que je m'entretiens quelque peu de mon expérience de formateur (d'ailleurs, des retours d'expériences concrets manquaient quelque peu à ce niveau, même si l'on n'avait pas le temps -- je vais regarder le rapport complet plus en détail), et je soulève deux points fondamentaux se rejoignant qui n'ont pas été abordés : pourquoi un étudiant choisirait-il une filière embarqué hautement complexe pour être amené à travailler à Vélizy (conditions de travail quasiment toujours dégradées, j'ai tout de même bossé six mois en face d'un mur, la fenêtre la plus proche à 50 mètres non visible, à Thales Colombe) payé au lance-pierre (c'est un fait, les salaires sont inférieurs aux autres spécialisations techniques, et je ne parle même pas à compétences égales), alors qu'il pourrait se caser pépère à la Défense pour faire du Java bidon dans une banque ? Sans parler des perspectives d'évolution de carrière et de la valorisation du travail (on croît que faire des satellites est a priori très valorisant, mais dès lors que l'on se retrouve comme une toute petite pièce d'un très grand rouage, quelle est la satisfaction réelle ?). Certes, la tendance est à l'amélioration du métier (ou à la dégradation des autres ? Pensons notamment à la crise économique qui a affecté les banques, donc nos adeptes de l'IHM Java), mais c'est ici que se situe le problème, et la forte demande en compétences très variées et techniques (on nous demande de savoir aussi bien faire de l'assembleur que de l'interface graphique...) n'aide pourtant pas la hausse des salaires dans le milieu ; ce n'est pas la peine de chercher longtemps ailleurs (le "ailleurs" qui peut être aussi la "pression" du métier : risquer de planter un avion est autre chose que risquer de planter une appli web).

Je m'entretiens aussi un peu avec un représentant de Wind River (il a remarqué que j'étais un peu partout, avec mon chapeau, pratique), qui a lui aussi des problèmes de visibilité sur les formations (au passage, je parle rapidement du rachat de la boîte par Intel, toujours sous l'émotion). Et puis c'est l'heure de partir à la chasse au fromage, ce qui est certes fort bon (surtout si l'on aime, pour les autres il y a du gâteau au chocolat), mais qui ne m'aurait pas semblé forcément très adapté pour les rencontres de visu a priori (admirez ce déploiement d'euphémismes). Le "networking" est en effet prévu dans la pause 12h30-14h00, mais je n'ai pas eu l'impression que les rendez-vous formels, à prendre d'avance sur le site web consacré, ait eu un succès énorme. Pour ce genre d'événements, il faut inciter au brassage, et de ce point de vue-là, l'événement a quelque peu péché. Les deux ou trois stands de partenaires, Sysgo à l'entrée, et de mémoire Geensys et Microsoft, n'accueillaient pas vraiment foule, tandis que leurs animateurs étaient partis directement au contact -- laissant bien souvent le stand vide. J'y reviendrai.

La reprise se fait sur les Trophées de l'Embarqué 2009 (par Jessica France), selon cinq catégories : l'Embarqué critique, l'Embarqué grand public, le capteur embarqué, l'Embarqué communicant et les Technologies de l'Embarqué. On en parle suffisamment dans les comptes-rendus officiels pour passer rapidement dessus, tout en saluant les mérites des gagnants (et des perdants...). À 14h45, il est temps de présenter rapidement le "livre blanc des systèmes embarqués"  (téléchargeable là), par Eric Mittelette, responsable du groupe de travail associé. La plaquette nous dit : "le Comité Embarqué de Syntec informatique, publie un Livre Blanc s'adressant au grand public qui illustre de manière concrète le monde des Systèmes Embarqués". Il a cette formule malheureuse d'entrée : "faire connaître notre jeune industrie", qui me laisse pantois avec mon ami, d'une vingtaine d'années plus âgé que moi, et d'ailleurs on retrouve bien en introduction du livre que l'informatique embarquée aurait moins de 20 ans. Il ne faut pas chercher bien loin pour déclarer que non, l'informatique embarquée est largement plus âgée, et tout dépend de la définition que l'on retient, apparaît même avec l'informatique tout court.

Le document d'une vingtaine de pages est clairement orienté très grand public, et avant un exemple tiré de la vie courante de confrontation à notre type de technologie, Eric Brantegnie fait justement remarquer que "paradoxalement cette industrie est peu connue du grand public, des décideurs économiques et politiques, des étudiants et du monde de l'enseignement". Une raison à cela selon moi : l'inculture technologique ambiante, qui associe à peu près tout ce qui existe à une aura de magie mystique complexe à appréhender. Il y a trois ans et demi, au salon du livre, je demandais à la personne sur le salon si elle savait sur quel système tournait le livre électronique (qui faisait alors son apparition) qu'elle proposait : "mais monsieur", me suis-je vu répondre, "c'est totalement électronique !". Idem à propos des téléphones portables, l'électronique a été assimilée, mais pas encore le fait que des personnes ont pu coder dessus, alors même que c'est là où se situe la véritable valeur ajoutée ! Bref, le livre blanc reste très général -- sans oublier cependant de mentionner les gagnants des trophées 2008, allez savoir --, et n'hésite pas à consacrer de larges pans à la "pollution et émissions de CO2" (page 17), au milieu d'une grosse tranche sur l'automobile, une interview de vrais gens de l'Embarqué dont on précise le nombre d'enfants qu'ils possèdent, et on nous tire même une larme à la page 22 ("tenir compte des considérations éthiques") : "[les logiciels embarqués] participeront ainsi activement au bonheur et à l'équilibre de notre société" ; avant de sauver les vieux (heu, personnes âgées), les logiciels embarqués, c'est avant tout du militaire. Bref, l'intention est bonne mais le résultat me paraît quelque peu bancal (comme on me dira que la critique est facile mais l'art difficile ; je précise donc que je me suis essayé à l'exercice et que j'ai produit un document interne -- orienté Linux, avec une vue d'ensemble du marché sous ce prisme --, que vous pouvez me demander, chers collègues -- pour les autres, envoyez un CV à notre RH, on étudiera votre demande). Peut-être est-ce dû à l'origine pas assez représentative des rédacteurs et intervenants -- mais comme Eric Mittelette est responsable groupe développeurs, division plate-forme d'entreprise Microsoft, j'ai peur que l'on m'accuse ensuite de partialité.  :)

15h00 : première table-ronde, "exemples de projets français, allemands ou franco-allemands dans les domaines du transport automobile et ferroviaire". Un animateur, Sylvain Dorschner, Délégué Général du pôle de compétitivité System@tic ; et différents intervenants, Christian Balle de Renault (directeur adjoint Electronique Avancée, membre du Bureau Exécutif System@tic, qui nous parle du système 4RD de la Laguna, qui est celui-la même qui a été primé peu avant, me semble-t-il -- il s'agit d'avoir 4 roues directionnelles), Louis-Claude Vrignaud ([ancien?] Président d'EICOSE, l'European Institute for Complex Safety Critical Systems Engineering -- voir ici aussi), Jacques Bercot (Valeo, directeur du centre pour l'Excellence Electronique du projet STOP&START -- la voiture s'arrête lorsqu'elle est à l'arrêt, si l'on me pardonne l'expression), et Daniel Cadet (Alstom Transport Technical, Directeur des relations extérieures -- ce qui est assez ironique, car il nous affirme qu'il est très heureux d'avoir échouer à faire parti de consortiums pataugeant dans la semoule à essayer de se mettre d'accord et de travailler ensemble, quand de son côté, Alstom a su faire progresser et réussir les même projets concernés tout seul et sans interférence extérieure). Une question du public porte sur la sécurité des automobiles : un intervenant répond que la certification sur automobile ne sera jamais poussée aussi loin que celle pour les avions ou autres transports en commun, pour une simple raison de coût-bénéfice, sachant que d'une part c'est quasiment toujours le conducteur qui fait la faute (on remarquera que de toute façon, lorsque l'électronique est en cause, le débat est toujours saboté, comme pour les régulateurs accusés ; quand on ne passe pas simplement sous silence les calculateurs de bord qui prennent feu chez Renault -- la faute à Siemens, avais-je entendu dire --, ou que l'on rappelle des milliers de voiture pour les patcher sans donner la raison exacte chez Peugeolt -- là encore, par des contacts, il semblerait qu'à un moment les portières automatisées avaient tendance à s'ouvrir inopportunément), et que d'autre part crasher un avion n'a tout simplement pas le même effet en terme de pertes humaines que planter une voiture ; c'était la minute de cynisme capitaliste (ce n'est pas péjoratif, mais enfin il est de bon ton de rappeler les fondamentaux économiques qui dirigent à l'industrie).

Au bout d'une demi-heure, c'est la pause café/networking (like we say in good French  German eerr), l'occasion de retrouver mon PDG, Alexandre Zapolsky, qui par une pure coïncidence (mais on avait répété la veille) se trouvait dans le ministère. Tandis qu'il va saluer le Syntec et autres très bonnes connaissances, je pars à la chasse aux contacts -- et tombe en premier sur mon ancien directeur d'étude de l'EPITA, avec qui je m'entretiens de la bonne évolution de la filière, surtout depuis qu'elle a absorbé une autre autrefois dédiée à la recherche. J'arrive à m'imisser dans une discussion (ça parlait des jeunes, coup de chance) et me fait un bon contact à la SNCF ; et par hasard, un universitaire de Nancy (je parle de la difficulté à mettre en place des TPs : leur professeur fait un séminaire d'une semaine, et le un jour est entièrement consacré à mettre en place la dizaine de postes, tandis que le TP prend la journée suivante). Du coup, j'arrive un peu en retard pour la seconde table ronde, qui de toute façon m'intéresse moins. D'ailleurs, les départs sont assez nombreux, comme mon ami qui m'a jusqu'ici accompagné (notamment à la chasse au fromage, ce qui est important, pardi).

Cette table-ronde parle de projets dans les domaines de la domotique et du développement durable. La domotique, cela fait tellement de temps que l'on en parle que l'on commencerait presque à en douter plus que fortement. La voilà associée au buzz world du moment, il n'y a plus qu'à ajouter "incitation fiscale", et nous y sommes. C'est Nicolas Leterrier, Délégué Général de Minalogic qui anime, et j'arrive sur la toute fin de la présentation de Jean-Luc Dormoy pour EDF Group Strategic Marketing Comitte, dont il est le Home Technology & Smart Meter European Programme Director (tout un program), à propos du produit "YELLO Sparzähler Compteur intelligent" (sic). Puis c'est Didier Pellegrin de Schneider Electric, qui nous présente le projet HOMES, dont il est le directeur : "HOMES définit de nouvelles architectures pour le contrôle et la distribution de l'énergie dans le bâtiment, pour mettre sur le marché les produits et solutions nécessaires à une meilleure efficacité énergétique et permettre le développement de nouveaux services". Bonne chance. Le responsable du Programme de Recherche M2M d'Orange Labs (Groupe France Telecom) André Bottaro a une mission tout aussi précise : "Senscity : Orange Labs et un réseau de PME collabore au développement d'une offre technologique et d'un business model pour des réseaux de capteurs destinés aux collectivités engagées dans une démarche de développement durable". Et justement, on finit avec Didier Dufournet, dirigeant de la société Azimut Monitoring, pour "les réseaux de capteurs et standardisation des protocoles".

16h30, c'est l'heure du grand témoin, en l'occurrence le Dr James Goldberg : "TIC et Cancérologie: que peut-on attendre de l'embarqué en matière médicale ?". Là, j'avoue que c'était franchement étrange. Nous sommes partis dans des considérations un peu folle (ça a tout de même dévié sur l'assurance maladie aux Etats-Unis -- prévoyez d'être riche si vous souhaitez avoir plusieurs échographies), et je me suis souvent demandé comment on allait retomber sur nos pattes. En tout cas, on était très éloigné d'une synthèse (de toute façon, avec des slides et un discours déjà préparés...), et cela a duré une demi-heure, tout de même. On a cependant eu droit à une liste de désidératas pour rendre la vie meilleure aux médecins et patients, on verra ce que General Electric propose -- car oui, le secteur est cloisonné... (oh, on parlait aussi du dossier médical électronique, ça en revanche ça peut nous intéresser au plus haut point)

Une heure restante avant la fermeture à 18h00, pour un cocktail de clôture, qui à vrai dire n'avait pas une pêche d'enfer, et a encore plus souffert, parmi les restants, du phénomène de grumeaux : ceux qui se connaissent forment des groupes de trois ou quatre personnes, et se tiennent en position fermée. Prendre d'assaut de telles forteresses sociales est d'autant plus difficile que l'on ne sait jamais trop sur qui l'on va tomber -- c'est ainsi que je me suis retrouvé au milieu de discussions dont il faut faire preuve du plus grand génie pour s'en échapper diplomatiquement. Manifestement, c'est là le gros point faible de cette journée : l'interaction entre les participants a été en réalité plutôt faible, en ce que les nouveaux contacts ont été particulièrement difficile (ainsi la pêche aux cartes de visite a été basse, et la distribution idoine). C'est d'autant plus dommage qu'il y avait particulièrement du beau linge, comme on a pu le voir dans les attributions de chacun. C'était généralement des directeurs de petites structures, des délégués généraux d'associations d'entreprises, des directeur de projets, ou encore des directeurs d'étude (on pouvait croiser un bon nombre d'écoles, dont certaines qui m'étaient jusque là inconnues). Bien du monde a fait le voyage depuis la province, moins depuis l'Allemagne -- je n'ai d'ailleurs pu discuter avec aucun Allemand ! Continuer a posteriori sous forme de discussion informelle un sujet avec le conférencier concerné était mission impossible, contrairement à un salon plus classique comme RTS (selon un autre modèle, certes).

L'événement est sans conteste original, mais je me demande toujours pourquoi le grand témoin n'était pas quelqu'un du ministère. On parle crédit impôt recherche, mais surtout emplois et R&D, développement technologiques de très haute importance -- automobile, satellites, télécom, et j'en passe, le militaire n'ayant pas été abordé, bref de ce qui intéresse le gouvernement --, on précise même dans le livre blanc que les décideurs connaissent mal le milieu, mais pourtant, outre que le secrétaire d'État concerné a annulé sa venue, il ne me semble pas que les conseillers de son cabinet étaient présents outre mesure. Peut-être ont-ils a posteriori visionné la vidéo complète de la journée (avec plus de chance que moi, pour qui ça ne marche pas), mais cela laisse une impression étrange. Autre complainte : une formule de speed dating aurait été tellement plus agréable pour parfaire son networking ! (avec une allitération gratuite, en plus) Mais le contenu des conférences étaient dans l'absolu de très bon niveau, l'organisation rigoureuse et le cadre très agréable, c'est donc un bilan positif que je dresse de cette journée -- après tout, il s'agissait avant tout d'assises, soit de dresser une sorte d'état des lieux, comme l'annonçait la dénomination de l'événement --, qui aura eu le mérite d'installer un peu plus Linagora dans sa stratégie de développement du pôle embarqué -- si ce n'est de nous faire simplement connaître sous cet aspect, notamment auprès du Syntec informatique.

mercredi, avril 8 2009

salons RTS et Solutions Linux 09

Les salons Real Time System et Solutions Linux se tenaient en même temps, cette année, porte de Versailles tout deux. J'avais déjà évoqué les bons et très mauvais points de cette connivence de dates et de lieux il y a six mois environ, et comme je le craignais, les seuls avantages que pouvait amener cette situation ont été annihilés par la distance assez élevée entre les bâtiments 8 et 2.2 : combien de fois n'ai-je entendu les uns et les autres avoir hésité entre les deux salons (WindRiver), ou promettre de passer sur l'autre (SFR) sans qu'on les y voie faute de temps, et en tout cas se plaindre de cette situation ? D'une manière générale, peu de société de Linux embarqué ont choisi Solutions Linux plutôt que RTS ; on pourra citer Concurrent Computer, tandis que Sphinx, habituellement présent sur les deux, a préféré RTS. Linagora était évidemment sur Solutions Linux, mais pas sur RTS. Avantage cependant de ces dates simultanées pour Linagora : pouvoir dépêcher sur RTS un commercial/avant-vente dès lors que j'avais repéré une affaire potentielle ; en l'occurrence, Sébastien Bahloul aura fait quelques allers-retours (compter un peu plus de dix minutes de déplacement pour l'opération...). Mais voilà : parfois, le simple temps d'alerter d'un bon, et le temps d'arriver (parfois le lendemain, quand on a repéré quelque chose d'intéressant la veille au soir), les intervenants sur les stands ont changé, et plus que répéter le travail d'approche, il est arrivé plusieurs fois où le bon interlocuteur, le seul qui pouvait faire interface, avait disparu. C'est ainsi qu'une fois une société me dit avoir grandement besoin de services Linux, et le temps de revenir, tout autre son de cloche, très peu de Linux en vue : en fait, les deux personnes adressaient des marchés totalement disjoints.

Cela fait cinq ans que je reviens sur le salon RTS, et six pour Solutions Linux. D'expérience, le premier est bien plus intéressant que le second, en ce qui concerne Linux embarqué, mais il n'est pas impertinent de choisir le second plutôt que le premier dès lors que l'on propose du software, surtout s'il s'agit de temps-réel pouvant avoir vocation à des applications de type serveurs. C'était cependant SL qui ouvrait le bal avec une conférence dès le premier jour (31 mars) au matin sur le sujet : Sébastien Dinot comme modérateur, et des gens connus ou reconnus comme intervenant ; citons donc le traditionnel Christian Charreyre de de CIO informatique (nos concurrents marseillais), et les plus nouveaux David Chabal (toulousain dont j'ai relu l'excellente documentation sur Xenomai, que je n'arrive toujours pas à trouver en diffusion publique, mais je suis dans les remerciements), Lucas Bonnet (monsieur OpenMoko France) et Etienne Juliot (Obeo). Pour un compte-rendu très complet, il suffit d'aller lire l'excellent rapport de Thomas Petazzoni. Il se trouve que j'ai décidé de sécher cette conférence : déjà, parce qu'elle était payante, et qu'il fallait donc magouiller un pass' conférencier sur notre stand (perte de temps, quand tu nous tiens), et ensuite parce que j'ai préféré arpenter RTS sur le peu de temps imparti, qui ne me semblait pas justifier de sacrifier une demi-journée. Je pense avoir eu raison : même si je n'avais pas assisté à la session RMLL 08, j'avais lu les slides, et il se trouve que le Chabal et le Bonnet ont fait de la redif' ; la conf' plus généraliste de CIO m'aurait certainement un peu ennuyé ; et celle d'Obéo a été rediffusée sur le salon RTS, où je n'ai d'ailleurs pas été plus avancé que Thomas (on y reviendra). Il ne m'étonne en tout cas que moyennement que seuls une dizaine de personnes y étaient présentes.

C'est ce que l'on appelle "un beau gâchis". J'avais moi-même pré-postulé il y a bien longtemps pour donner une conférence sur le portage Linux embarqué sur architecture ARM non supportée, mais le temps de confirmer (ie d'avoir réellement porté le bestiaux), les trois autres intervenants étaient retenus. Quatre, c'est bien peu, d'ailleurs. J'avais alors prévu de présenter le même sujet sous un angle différent pour la conf' RTS "les outils open source dans l'embarqué", qui a été annulée silencieusement (mais j'ai appris à la fin du salon que François Gauthier avait regardé les activité de Linagora suite à mon mail, et que c'est ainsi qu'il contacta Benjamin Jean, notre juriste, pour la session "la jungle des licences logicielles"). Je donnerais a priori cette conférence (dont l'université Paris 8 a pu avoir un court extrait) au RMLL 09, à Nantes, finalement. Il se trouve, en tout cas, que j'ai par le plus pur des hasards prédestiné, rencontré Francis Mantes, au sortir du salon RTS avec Sébastien, après être allé rencontré des gens intéressants : allumant sa pipe, j'aperçois son badge, et vais donc immédiatement à sa rencontre. Nous avons discuté un bon moment (il se souvenait par ailleurs du court échange que nous avions eu par mail), et avons déploré la distance des deux salons mis ainsi en concurrence (si Groupe Solutions organisait les deux auparavant, il semble que SL soit passé sous l'égide de Tarsus) : il a été décidé de prévoir une semi-journée Linux l'année prochaine, avec force ateliers et conférences à but technique plus que commercial ; non seulement j'abonde, mais je salue la pré-initiative (en outre, puisque l'on m'a invité à rappeler par mail cet échange, je ne manquerai pas de lier ce compte-rendu, et j'en profite donc pour saluer le travail organisationnel de notre hôte).

Mais revenons-en à nos hardeux. Car le salon RTS c'est avant tout du silicium et de l'époxy, il faut bien l'avouer. Les "softeux" (ça sonne plus mal) sont peu nombreux, on compte les gros WindRiver, GreenHills Software ; il y a Sysgo, mais nul LynuxWorks cette année, et pas de Montavista non plus. Bref, on fournit du BSP (Board Support Package, pour les n00bs), mais pas de service informatique à proprement parler : un seul concurrent -- et de taille, quoique, il faut considérer que l'informatique embarquée représente aussi chez eux une partie seulement de leurs activités --, possédant un stand, côté M2M, à savoir Teamlog. À noter au passage qu'outre RTS, il est de tradition depuis plusieurs années de lier M2M (Machine to Machine, toujours pour les n00bs) et Display (affichages numériques) ; il y a cinq ans, le second connaissait un succès monstre avec force téléviseurs, imprimantes 3D ou autres, mais il doit être concurrencé par un autre événement non identifié, car il n'y a plus que quelques sociétés proposant des affichages digitaux (on reste néanmoins admiratif devant des écrans cristaux liquides d'une qualité impressionnante).

Ma mission a donc consisté à aller démarcher les vendeurs de hard et de BSP, pour nous faire connaître : oui, nous, Linagora, société de services en informatique libre (et éditeur, sur d'autres parties), partant d'un concept généralisé mais experts dans notre partie, à l'originalité indéniable notamment concernant notre interfaçage privilégié avec la communauté (aka "le monde du libre"), et disposant depuis un an et demi d'une équipe aguerrie d'ingénieurs informaticiens rompus aux techniques de l'embarqué, du temps réel, de l'industriel.

Il faut reconnaître un certain succès a priori (a posteriori, on verra si des affaires nous reviennent, il faut attendre un certain temps pour cela) : premier bon point, j'ai l'habitude de ce salon, certains intervenants me connaissent fort bien à force, je suis donc à l'aise ; second bon point, et de taille, la démarche est fort originale, et répond à un besoin déjà identifié par les acteurs. En effet, les vendeurs de matériel électronique (le "hard"), qui peuvent aller de la puce à la carte, du module au PC durci, n'ont que très peu de connaissances logicielles, et lorsque des clients viennent les voir avec une idée de développement logiciel derrière la tête, les fameux "applicatifs métiers", ce n'est pas forcément en ayant déjà à disposition l'expertise technique suffisante. Or, acheter un bien matériel que représente une carte de développement, une carte industrielle, ou un module de communication M2M est une autre paire de manches que dégoter l'ingénieur expert pouvant concevoir le système software qui va faire d'un hardware inanimé monts et merveilles. J'ai assez assuré de prestations chez des grands comptes qui cherchaient une personne qualifiée depuis six mois ou plus pour le savoir. Le positionnement de Linagora est alors simple : vous savez faire le hard, nous savons faire le soft, nous existons, faîtes-le savoir à vos clients !

Aussi, nous n'entrons pas en concurrence frontale avec les autres acteurs comme Sysgo, Montavista ou autres, qui ont déjà des accords pour fournir des BSP ou autres solutions de Linux embarqué/RT "clef en main" : nous construisons au dessus, nous intégrons, nous apportons la plus-value sur mesure, du "bespoke (free) software solution", en somme (la fashion victime qui sommeille en moi va copyrighter cette expression, tiens). À noter aussi que Linagora n'est pas un ayatollah du libre : notre société promeut le libre mais n'y oblige pas ses clients, et si le sujet est sensible dans l'industrie, j'en suis tout aussi conscient ; cependant, nous pouvons concevoir du logiciel propriétaire à la demande par dessus du logiciel libre (notre spécialité se situant ici, ce qui comprend les problématiques de licences), et ce de l'avant-vente jusqu'au support OSSA (Open Source Software Assurance : le service après-vente de luxe par Linagora), tout en vous proposant de reverser les parties de modifications de logiciels libres utiles à la communauté selon votre bon vouloir (mais croyez-moi : mieux vaut participer, gagner en plus l'estime du public averti, et éviter de redévelopper les mêmes patches à chaque fois que l'on veut effectuer une mise-à-jour interne du produit ; bien des coûts cachés sommeillent dans le logiciel libre, il est de notre devoir de proposer de les optimiser pour le bien de tous).

Voilà pour la communication externe, toutes mes excuses aux collaborateurs qui se seraient ennuyés...

La pêche fut très bonne : il est envisageable de rassembler la masse de cartes de visite (sachant qu'il faut parlementer un minimum pour en obtenir une : pas tout le monde n'avait un stock à disposition, loin de là) en un jeu des sept familles, mais il sera plutôt préférable de faire du business avec. Je ne dirais donc pas que le salon était vide, à l'instar de Thomas dans son compte-rendu sus-lié, les allées étant peuplées et les stands quasiment toujours occupés ; de plus, trois ou quatre conférences se tenaient constamment en même temps, avec plus ou moins succès -- mais au moins, elles y sont gratuites. J'ai fait le constat inverse concernant SL dès lors que l'on s'éloignait des stands Linagora-Novell-Canonical (ces derniers exposant, juste en face de nous, leur réussite sur les migrations Assemblée Nationale et Gendarmerie, et ce sans nous citer ! Incroyable mais vrai), comme quoi ça devait dépendre de l'heure. Car finalement, je n'ai passé que peu de temps sur le salon linuxien, en fin de journée ou à la pause déjeuner essentiellement, histoire de voir un peu de monde, de passer sur notre stand, ou de saluer des amis d'associations de libristes. Et puis aussi participer au cheese'n'wine du second jour, le soir -- du moins au début des festivités, un pré-Wagner m'attendait au théâtre du Châtelet.

Puisque je réserve un retour détaillé des différents intervenants très intéressants à recontacter en interne (non, je ne donnerai pas des pistes à la concurrence, il ne faut pas pousser non plus  :)  ), passons donc aux comptes-rendus des différentes conférences. J'ai commencé par une première session de 14h00 à 16h00 consacrée à la certification logicielle : le sujet m'intéresse beaucoup, j'ai justement contacté quelqu'ami chef de centre de Systerel (associé l'année dernière à Sysgo par un stand commun, mais pas cette fois) à ce sujet, car il n'existe aucune formation dans l'absolu. Différents intervenants au programme : Lionel Burgaud de Geensys a parlé d'organisation collaborative, parce que spécifier chacun dans son coin des bouts de code similaires est passablement contre-productif. GreenHills, qui a fait certifier sa solution Integrity EAL6+, après trois ans de torture (les développeurs sont aussi passés à la question) par la NSA, montre effectivement les limites de la procédure (longueurs et retards technologiques) ; Serge Plagnol (ou son collègue Rolland Dudemaine ?) m'avait, peu de temps avant cette présentation, fait un exposé sur son stand de l'attachement de GHS à la sécurité (il a montré une vidéo de turbine piratée à distance poussée à son extrême limite : de quoi attirer l'attention sur les failles de sécurité qui émaillent le code des développeurs de l'industriel) : c'est clairement le positionnement marketting de la société à présent. La vague sécuritaire touche d'ailleurs aussi la solution concurrente (mais à l'architecture différente : virtualisation vs paravirtualisation) de Sysgo, et c'est l'habituel mais toujours intéressant José Almeida (cinq ans que l'on se voit, alors à la pause, on devise ensemble, forcément) qui cette fois ne nous parle plus Linux ou PikeOS, mais DO178B (du niveau E au A, pour l'avionique), Common Criteria avec EAL/MILS (du niveau 1 à 7), IEC61508/ENSO128 (de SIL 0 à 4, par un positionnement parallèle à la DO-178B, mais pour le ferroviaire cette fois), ou encore ECSS (espace), FDA (médical) et que sais-je encore : un vrai fouillis ! Les prédispositions communes sont la fiabilité, la disponibilité et la réutilisation, à mettre en corrélation avec le Time to Market ; d'autres concept sont encore abordés : certification incrémentale, méthode formelle, mélange de niveaux indépendants, utilisation en redondance (pas facile de relire ses notes, d'autant qu'il faut effectuer une traduction à la volée...). On évoque aussi des différences dans les habitudes de codage avec l'apparition d'APIs POSIX/ARINC. Enfin, on parle d'ESA, dont le projet est la convergence de certifications (ECSS, DO178B et CC/EAL5+), en recoupant les similitudes pour gagner du temps.

C'est ensuite à Matteo Bordin, d'AdaCore (tiens, un intervenant que je ne connais pas, uniquement anglophone d'ailleurs), "toward a lean approch of certification", qui parle d'open-do.org. Ce projet recoupe ce qui avait été abordé justement par GHS (mais ils ne se connaissaient pas tous les deux, un comble pour des prôneurs du coopératif !), à savoir la collaboration et la mise en commun pour accélérer les certifications, selon un nouveau moyen hérité des méthodes Agile. On remarque en premier que la certification actuelle se fait d'un seul bloc : on écrit entièrement le code, puis on le fait certifier, on attend quelques années, et voilà. Mais rajouter du code ensuite fait automatiquement sauter la certif', et il faut alors recommencer le cycle depuis le début : dans le cadre d'un logiciel communautaire (au hasard un compilateur pour langage Ada), on comprend que ce soit passablement gênant. L'idée est alors de recouper le libre, l'agile, et la certification High Assurance ; on voit une potentialité dans le militaire, l'espace et le ferroviaire pour une communauté HA, on compare la méthode de certif' DO178 vs Lean/Agile, et on expose enfin le but d'OpenDO : communauté ouverte, partage, base de connaissance, apprentissage méthodologique (education, en anglais dans le texte) et de l'Agile dans les process. Why not ? Comme "bootstrapping" (on reste parmi des techos, on a le droit au détournement d'expression -- quoique) : FP7 en Europe et DARPA aux USA. Bref, ça démarre...

C'est au tour d'Olivier Charrier de WindRiver, sur le sujet de l'avionique modulaire intégré (IMA), partant du concept qu'en avionique comme en automobile, l'augmentation des fonctionnalités s'observe parallèlement à la baisse du nombre de CPUs embarqués, qui deviennent multicoeurs, déjà qu'ils avaient tendance (oh my god tout ça) à avoir de la MMU, du DMA, et on en passe des meilleures qui imposent (attention puristes, ça va vous faire mal) l'utilisation d'un OS. Résultat : des problèmes de synchronisation dans les développement hardware, software, l'intégration des deux, le tout avant certification. On attire l'attention sur le point d'achoppement principal que constituent le debuggage et le testing. Thomas Cenni de MathWorks (éditeur de Matlab, évidemment) parle de tout autre chose : génération de code certifié, instrumentation simulink et le tout sous couvert de Polyspace, racheté il y a plus d'un an à présent (différence entre Polyspace et Coverty : le premier indique quelles sont les zones totalement fiables et certifiables, le second indique les bugs potentiels : chacun prend le problème par un bout, cependant à 45K€ la solution -- sans compter la prise en main que cela implique --, mieux vaut ne pas se tromper d'approche ou être riche !). Enfin, Luc Coyette d'Esterel entretient des problèmes de spécification et de tests, impliquant la détection tardive de bugs, faisant exploser les coûts (jusqu'à devenir intolérablement haut dans certains cas) ; sa solution : SCADE, aliant langage formel, générateur de code certifié, simulateur et vérification de compilation. Il annonce que 8 millions de lignes de codes générés pour 40 modules sont embarqués dans l'A380, au niveau A de la DO-178B ! En séance de questions, quelqu'un demande pourquoi on n'applique pas les même normes draconniennes à l'automobile (extrait du magazine "Electronique" : " 'le standard DO-254 [ndlr: certif' de systèmes un peu plus complexes que pour la 178], quant à lui, est très jeune puisque le document date d'avril 2000', explique Lionel Burgaud (GeenSys)", ça donne une idée du niveau) : réponse, parce que ça coûterait trop cher pour quatre morts de temps à autre, sans que l'on sache trop (et à vrai dire, on ne cherche pas trop à savoir) si c'est le régulateur de vitesse ou la mauvaise conduite qui en est à l'origine ; un avion de 240 personnes qui se crache, c'est une catastrophe qui passe au JT, mais effectivement, il y a bien 50 fois moins de morts par accident d'avion en France que par voiture, c'est juste que le coût par vie est moins rentable tout considéré. On apprécie la franchise.

Seconde conférence : tests et sécurisation en milieu embarqué, le second jour au matin (10h à midi). Le propos était fort semblable, et si l'on y ajoute que le magazine "Electronique", distribué gratuitement (au lieu de 12,20€ les 65 pages pubs nombreuses comprises, sacré pouvoir d'achat chez les hardeux !), consacrant un dossier en couverture de cinq pages sur le sujet (et deux à l'amélioration du temps de boot de Linux, au passage), cela montre l'intérêt porté à la question, d'autant que l'audience comportait encore trente à quarante personnes. Bref, sous l'égide de François Gauthier, de ladite revue électronique (mensuel arrivé au numéro 200, quand même), le premier intervenant est encore de chez GreenHills, le fort connu Serge Plagnol : il nous parle d'hyperviseurs (tendances, techniques et applications), comparant para et full (ainsi que l'hybride) virtualisation (notamment par rapport au portage de drivers, inutile dans le premier), mais aussi de type 1 (à la ESX) vs type 2 (à la VMW workstation) ou hybride, comme  c'est le cas de, KVM mais aussi d'Integrity, qui peut ainsi aussi exécuter des applications. On considère ensuite les différentes architectures : monolythique (ESXi, VLX -- VirtualLogix était d'ailleurs absents, tout comme Trango et OKL4), Dom0 (Xen par exemple, mais le TCB est encore trop gros, on compte plusieurs mégas de code !) et enfin à base de microkernel, comme OKL4 (que l'on connaît assez bien par ici : mon ancien stagiaire a passé six mois sur le sujet) et Integrity, qui présentent un très petit TCB. On parle rapidement de ce que propose l'architecture x86 en terme d'aide à la virtualisation : VT-x (niveaux de privilèges) et VT-d (I/O virtualisés, dont la DMA, plus quelques autres joyeuseries) ; pour l'instant, l'Atom ne propose que du VT-x, mais une évolution prochaine est à attendre ; de son côté, ARM propose TrustZone, une double partition de fiabilité. Si l'on rappelle (page de pub) qu'Integrity est certifié à présent EAL6+, on insiste sur le fait que la virtualisation n'implique pas en soi la sécurité, bien au contraire ! Enfin, les applications de ce type de sécurisation par hyperviseurs seraient la téléphonie, les PC portables d'entreprise, les terminaux de paiement, le jeu avec transaction financière, et tout ce qui implique à la fois une communication (militaire notamment) et la présence simultanée d'une IHM.

Après cette longue présentation, c'est au tour de Jean Philippe Dehaene de présenter AUTOSAR, l'outil de simulation de VECTOR, les spécialistes en solutions logicielles (notamment sur bus de comm' CAN et LIN) pour l'automobile ; c'est intéressant pour qui est du milieu (très particulier, et qui ne va pas forcément bien en ce moment : passons). Didier Vidal d'ISIT expose les mérites de LDRA, l'analyseur statique de code ; c'est que la relecture manuelle de code trouve sa limite à 10 pages par jour, même si elle corrige 80% des bugs fonctionnels. La relecture automatisée, à l'inverse, ne peut pas trouver les erreurs fonctionnelles mais relève 80 des bugs techniques. À l'aide de règles de codage (MISRA-C 2004), de graphes d'appels, d'étude de code, de statistiques, de commentaires automatisés (ça j'aime !), de suivi de variables et d'exports des résultats dans des formats divers et variés dont le web (ça dépasse la simple relecture automatisée !), la société entend nous faire économiser bien de la sueur (contre un gros chèque, certainement). Fait très amusant, dans le contexte : alors que l'on passe rapidement les très nombreux slides, et que le transparent 60/60 concerne la détection de buffer overflow et d'overrun, on continue la présentation jusqu'à la slide 67/60 !

Ben Chelf, CTO de Coverty (et anglophone only, sorry) parle d'une nouvelle solution d'analyse de compilation : ça c'est fort ! Le problème du build est l'effet "boîte noire" (black barrier), peu importe si le compilateur est est libre ou non, à la rigueur, étant donné la complexité actuelle. L'analyse de build construit une carte du système de compilation complet en s'interfaçant entre les outils et l'OS ; un exemple est alors donné en utilisant... OpenOffice.org ! Ça ne s'invente pas, et évidemment, le graphe peut servir à faire peur aux petits enfants le soir. À noter que d'une manière générale, les outils libres sont implantés partout : on s'en sert directement (gcc et eclipse en star, encore plus que Linux) ou indirectement, comme base de proof of concept ; coverty s'est fait une spécialité de découvrir les bugs de logiciels libres pour à la fois se faire de la pub à peu de frais sur une base de code énorme, et tester leur outil en même temps (ce qui me fait penser que je leur ai parlé du bug de ifstated sur bagotage d'interface réseau : arriveront-ils à le trouver ?). Leur logiciel explore les différentes phases de la compilation : le make clean, les macros DEBUG ou RELEASE, les options de sécurité, etc ; fini les peurs bleues d'avoir un fichier objet non regénéré à la suite d'une modification de .h ! (ça peut faire très, très mal, sur du code militaire mal foutu, surtout quand ça fait plusieurs dizaines voire centaines de milliers de lignes -- souvenirs douloureux). Outre l'analyse, un "build management" est proposé.

L'après-midi, je m'étais inscrit à la conférence sur la virtualisation, mais j'avais mal compris : c'était la virtualisation de la machine de développement dans le but d'émuler des plate-formes exotiques pouvant aller jusqu'à l'ARM OMAP ; comme j'avais déjà discuté assez en profondeur à mon goût de ce sujet avec les principaux intervenants, ECSI (attention ! web 0.2), je me suis enfui ; cependant, le sujet est extrêmement intéressant, pour avoir eu l'occasion de développer sur OMAP, justement, et donc de goûter aux 25 minutes de flashage intégral à chaque fois que l'on veut tester la solution (quant au développement par NFS, autant oublier : il n'y a pas d'Ethernet, voyons !) ; je crois donc sans problème le consortium européen (avec notamment une université lettone dans le lot, oui ça étonne) lorsqu'ils affirment pouvoir réduire par deux le TTM (Time to Market, si vous débarquez de Mars). J'ai donc opté pour l'autre conférence simultanée pouvant être intéressante : Agile dans le milieu industriel, encore introduit par François Gauthier qui avoue à la fois intérêt grandissant (ce que semble confirmer le monde présent) et la nouveauté de l'approche dans le milieu. Mauvaise pioche : Philippe Soulard (remplaçant Yves Lebeaupin) de Sodius me fait mal à la tête avec son exposé "Multi-tool & multi-model integration using IBM rules composer" : trop de sigles et concepts abstraits, c'est à se demander si l'on parle bien de méthodes Agile, en tout cas je ne suis pas ; Etienne Juliot d'Obeo (voir au dessus) prend la relève et commence par un remerciement à son prédécesseur d'avoir introduit autant de concept (ouille), avant de nous parler de ses outils de modélisation, avec du temps-réel et de la génération embarqués sous Eclipse (c'est ce que disent mes notes) ; je reste malgré le micro qui rend l'âme (embêtant, ces micros, vraiment) parce que ça parle OpenSource (j'ai appris plus tard que Linagora a un peu travaillé avec Obéo pour le ministère des finances, association qui n'a pu aboutir faute d'avoir obtenu le marché : je confirme que nous n'étions pas mentionné parmi les partenaires), mais au bout d'un moment, je finis par craquer (au bout d'une heure, en fait).

Dernier jour et dernière conférence : "la jungle des licences logicielles". L'intitulé a pas mal évolué, l'apparition de cette conférence le dernier jour (moins peuplé et terminant à 17h30) n'a pas non plus aidé au remplissage de la salle : seulement une dizaine de personnes présentes, ce qui a déçu François Gauthier (décidément, je n'ai pas fait exprès, mais nous partageons les mêmes goûts apparemment). L'année dernière, la salle était comble, et les intervenants clairement techniques et peu juridiques : cette année, tout le contraire, de vrais juristes et avocats, mais des erreurs techniques dans le discours (netfilter, le module Linux de firewall, est ainsi de venu "netfiles", logiciel). Pour l'année prochaine, il serait de bon ton de mêler les deux milieux, et je me propose dores et déjà, tant le sujet me passionne (le juridique d'une manière générale, en fait, et je devise régulièrement avec avocats et professeurs de droit, de surcroît) ; d'ailleurs, j'ai pu parler à la fin de l'affaire Guillermito, fort importante mais inconnus de mes interlocuteurs (pour ma part, j'avais tout simplement pris deux après-midi pour assister au procès et au délibéré). Les deux premiers intervenants sont Cendrine Claviez et Vincent Pollard du cabinet TAJ, mais arrivant en retard (pour cause de prospection), j'ai raté le début de l'intervention de la première, pour arriver au moment de la considération des effets héréditaires/viraux, classant GPL, EUPL, CeCILL A d'un côté, MPL, LGPL, Eclipse et CeCILL C de l'autre, et enfin MIT, BSD, ASF et CeCILLB ensemble. La volonté d'organisation de cette "jungle" est manifeste. On continue sur les résiliations, automatique pour la GPLv2 et l'EUPL, il y a un délai pour la GPLv3 : en cas de constatation de violation, on peut ainsi avoir le droit de continuer d'utiliser le logiciel en attendant la rectification, alors que pour les autres, la sanction est immédiate, avec l'injonction de cesser immédiatement l'utilisation ; pour la peine, la GPLv3 est bien plus favorable à l'industriel distrait ! (évidemment, nous considèrerons la bonne foi a priori de celui-ci) On parle de l'EUPL, versions 1.0 et 1.1, la licence libre européenne pensée pour agir dans la juridiction du licenceur en Europe, et selon le droit belge sinon, et comportant une clause de compatibilité avec la GPLv2, la CeCILL ou encore Eclipse (attention cependant à la GPLv3 ou tout autre licence rédigée après l'EUPL, et de facto non mentionnée : il faut rajouter en annexe). On rappelle que le relicenciement autorisé par la BSD implique de pouvoir rendre le code GPL.

C'est ensuite au tour d'Hervé Guyomard de présenter son outil phare de Black Duck Software, et il nous injective : "Know your code" ! Prenons un exemple : Cisco rachète Linksys pour 500M$, Linksys embarque dans son WRT54G du code de Broadcom, que lui a fourni son sous-traitant Cybertran ; pas de bol, c'est bourré de GPL, et la FSF intente un procès à Cisco. L'histoire va plus loin encore : le WRT54G à 60$ voit son code libéré pour respecter la licence, code qui se voit grandement amélioré par la communauté, et réembarquable dans le même appareil, concurrençant dès lors des solutions professionnelles de Cisco valant... 600$ ! Cette histoire bien connue des milieux libristes de l'embarqué illustre le propos de notre intervenant : avec 1400 licences OpenSource recensées (évidemment, la plupart sont des adaptations de licences bien connues : il suffit de rajouter des annexes ou de modifier des paragraphes -- on recense par exemple une GPL interdisant les usages militaires : il faut noter que cette licence n'est alors plus considérée comme libre, quoique toujours OpenSource), il n'est pas inhabituel de se prendre les pieds dans le tapis, et d'embarquer sans le savoir du code soumis à des termes de licences non pris en compte, et pouvant avoir de fâcheuses conséquences. Protex est une moulinette sur-évoluée de code basée sur une base de données et de métadonnées complète, pouvant dès lors détecter à l'aide de génération de fingerprint (inutile de ne changer que le nom des variables et des procédures : ce sera détecté) les composants OpenSource lors d'un audit de code ; l'outil sait même reconnaître les conflits de licences. Dans l'industrie mobile, Intel, Samsung, Siemens, Motorola, Nec, RIM, LG, Qualcomm, Palm, Cisco, Xerox, Sega ou encore NTT ont fait appel à leur service : c'est dire si le problème est largement pris au sérieux ! Hervé Guyomard affirme par ailleurs que toutes ces entreprises intègrent d'une manière ou d'une autre des produits OpenSource dans leurs appareils.

Le dernier intervenant est bien connu à Linagora, puisqu'il s'agissait de Benjamin Jean, notre juriste. Pris dans le marasme des transports (RER D ?), il est arrivé bien en retard et a totalement raté les premières interventions : sans filet et sans slides, il essaie de faire original en pointant les sujets les plus importants : droits et obligations, extension de la licence (jusqu'où la licence couvre-t-elle ?), l'élément déclencheur aussi (souvent, il s'agit de l'utilisation, donc de l'exécution, mais il peut s'agir du simple téléchargement !). Il indique qu'un groupe de réflexion est actuellement monté au sein du SYNTEC informatique. Et qu'il a donné une conférence complète dont les slides peuvent être trouvées sur le net (sauf que je n'ai rapidement pas trouvé, il faut mettre son blog à jour, Ben ! ;)  ). Il en oublie de citer le groupe dédié aux problèmes de licences libres qu'il anime, Veni Vidi Libri, on sent la fatigue après trois conférences sur le sujet en trois jours ! On passe à la séance de question, qui tournent toujours autour des mêmes points, le plus crucial étant : où commence et où s'arrête ce qui est couvert par la licence ? (dans le public, un représentant de Vector présente son activité : c'est surprenant de voir ça sur le salon RTS ! On a totalement changé de monde) C'est que le problème est pernicieux, sur des systèmes embarqués dont la limite avec le userland est parfois assez floue (WindRiver vient d'ailleurs d'en implémenter un sur VxWorks : je parie que c'est pour répondre à ce genre de problématiques), et je discute après la conférence avec un ingénieur s'occupant de l'interfaçage juridique (on se demande d'ailleurs comment on pourrait nommer ce nouveau métier, que j'ai déjà rencontré chez Philips : je ne sais pas trop, mais ça m'intéresse comme évolution de carrière) de la possibilité de jouer avec les share memory, via une couche logicielle libre mais plus permissible, y pour interfacer des modules GPL avec du propriétaire (technique quelque peu utilisée par les hyperviseurs de paravirtualisation, après tout -- et j'ai déjà croisé un projet réel pour cela lorsque j'ai travaillé pour Trango). Mais il est vrai que la GPL parle d'un "tout logiciel" : nulle technique, au juge d'apprécier en cas de litige, donc au meilleur expert ès enfumage (et vulgarisation) de montrer ses prouesses, nous voilà fortement rassurés... Notons pour finir que les brevets n'ont pas été abordés (sujet connexe aux licences), et donc que l'affaire Tomtom n'a pas été évoquée, ce qui est dommage.

C'est ainsi que s'acheva la dernière conférence : j'en avais bien prévu une autre, sur les standards logiciels, mais manifestement elle a été annulée, certainement faute d'audiance, le dernier jour étant effectivement largement plus vide. J'ai pour ma part pu observer que le VME vivait toujours et plutôt bien, même s'il partage à présent l'affiche avec toutes sortes de PCI industriels. Côté processeurs, les nouveaux ARM Cortex ont évidemment la côte, occultant ARM9 et 11, d'autant que de nouveaux OMAP sur base Cortex apparaissent (les ARM7 étant remplacés par les M8, les autres étant A8, avec une évolution en faisant monter les chiffres à côté de chaque lettre -- la nommenclature ARM est toujours très sportive, seul Intel fait mieux) ; la puissance de ces processeurs fait apparaître des solutions à base de Java, où pour une simple application en stand alone, un OS est inutile (certains abandonnent de fait Linux), la VM faisant office de tout, y compris de scheduler entre les différents threads. Côté PPC, on trouve du PowerQUICC III, qui se porte toujours aussi bien dès qu'il s'agit de faire de la communication. Et puis la star, l'Atom, que l'on retrouve partout : il faut qu'Intel a enfin corrigé les énormes pertes d'énergie qui font que les netbooks meurent de fatigue au bout de deux heures seulement, et qu'à présent, on peut réellement concurrencer du ARM, avec moins d'automie mais plus de puissance, dit-on ; en tout cas, la solution étant viable depuis environ quatre mois à présent, le temps de concevoir des cartes et l'on a pu constater que l'engouement était très, très récent ; le PC104 et le Geode ont en tout cas totalement disparu ! Les nouvelles techniques de virtualisation en cours d'implémentation devraient aussi pousser dans ce sens, et Intel promet l'arrivée d'un adressage direct de la flash, sans passer par un contrôleur (ce qui est, rappelons-le, la lose totale) : on pourra ainsi, comme sur ARM, considérer flash et RAM de manière contigüe, et avec la promesse de pouvoir outrepasser le BIOS (ils travaillent avec Microsoft, me dit-on, car actuellement nul OS ne supporte cela : il faut dire que le BIOS -- pour l'instant incontournable sur l'archi x86 -- ne fait pas grand chose, il initialise principalement des périphériques PCI avant de lancer le bootloader, mais il est bien connu que Linux outrepasse depuis longtemps le paramétrage du BIOS, et que le projet FreeBIOS s'appelait avant LinuxBIOS car il s'est basé sur du code d'amorçage de Linux). Bref, Intel va inventer ce qui existe depuis 20 ans, on s'en félicite. En fait, je ne sais jamais trop si c'est une bonne nouvelle de voir débarquer en force une architecture aussi mal foutue que le x86 dans le monde de l'embarqué, déjà que près de la moitié des projets l'utilisent (pourquoi ? Parce que c'est connu, effet "j'ai le même dans mon PC", psychologie commerciale basique...). Cependant, Linagora se fera une joie de développer vos applications sur ce type de processeur, nous avons d'ailleurs achevé un projet majeur sur plate-forme à base de Pentium M (qui, s'il n'avait tenu qu'à moi, tournerait sur PowerQUICC III).

Je n'ai malheureusement rencontré que fort peu de monde connu dans les allées de RTS, j'ai eu la joie de tomber par le plus pur hasard (je revenais de SL alors qu'il s'en allait) sur mon ancien chef de projet chez Sagem, à qui j'ai donc enfin pu demander des nouvelles de notre bébé, le MO300e (module Neptune avec Nucleus+Linux) : eh bien c'est une totale déception commerciale, les clients potentiels préfèrent une implémentation à deux CPUs, un OMAP très simple et rigide allié à un ARM9 très souple comportant son propre Linux customisable. Moralité : peu importe la dose de technique que l'on met dans un projet (en l'occurrence, le MO300e c'est de la virtualisation maison, une interface web pour administrer le Linux et notamment gérer ses propres applications additionnelles, une sécurité parfaite, un SDK facile à mettre en oeuvre où j'ai même incorporé un système facilité d'émulation, etc) tant qu'on n'adresse pas le bon marché, et que l'on ne répond pas aux attentes des clients. De peur de ne pas pouvoir faire face aux demandes de support Linux, le périmètre a été fortement réduit, avec notamment l'impossibilité de charger des modules personnels dans le noyau, figé au 2.6.18 : la solution étant fortement industrialisée, il n'y avait pas vraiment le choix, et la mise à jour de firmware est une plaie, puisque nous sommes sur des LU, les Logical Units, entièrement chiffrées puisqu'ayant accès au réseau GSM (je pense cependant qu'une solution pouvait être envisagée pour mettre à jour à chaud, mais la demande en mémoire flash aurait été trop coûteuse) : comme quoi mettre un seul chip est plus économique mais trop spécifique dans ce cas pour adresser un large marché aux besoins très divers. Bien dimmensionner veut aussi dire d'étudier le marché, et de ne pas ignoré -- comme cela avait été le cas à l'époque -- les demandes pressantes des clients sur certains points techniques ; une récente discussion par mail à ce propos avec une société de M2M autrichienne a confirmé cette tendance (après avoir testé durant quelques semaines le produit -- ils m'ont demandé quelqu'aide par mail, car la réactivité de Sagem n'était pas terrible --, les dernières nouvelles étaient que leur avis sur la viabilité du produit était de plus incertaine, et que Wavecom semblait être, à regret, de nouveau la "meilleure" solution).

J'aurais en tout cas bien voulu échanger quelques mots avec mes collègues de l'APRIL Sébastien Dinot et Thomas Petazzoni, recontrer enfin David Chabal, croiser Patrice Kadionik et Pierre Ficheux qui j'en suis sûr connaissent plus mon visage que mon nom (ou l'inverse, allez trop savoir, mais il y a un manque certain de corrélation :)  ), deviser avec Denis Bodor de Linux Mag' (mais il était tout le temps occupé, je lui enverrai un mail), ou me faire présenter au pôle édition d'Eyrolles (parce que finalement, à part un peu "Embedded Linux Primer", dont l'auteur a d'ailleurs écrit dans le "Electronique" du mois de mars distribué gratuitement, il n'y a jamais de technique pure et concrète de "comment embarque-t-on du Linux", ce qui est un peu un comble pour des bouquins de Linux embarqué au nombre de quatre ou cinq, qui restent pourtant très bons ! Bref, je caresse une certaine idée...). Il y avait du monde sur SL, mais il était difficile de le rencontrer. Patrick Sinz était en tout cas sur le stand de Emtec (ex-BASF), pour présenter le Gdium (il bosse maintenant pour Gdium SA, basé au... Luxembourg, hum), et d'autres STB/disques durs multimédias de la marque.

Pour conclure (comment ça, "enfin" ?), mon avis sur les deux salons est positif mais avec une petite réserve sur un sentiment diffus d'essoufflement ; comme je fais la même remarque chaque année, ça ne doit pas être si grave (et puis, c'est la crise). Mon principal regret est la disjonction des deux salons. Un workshop géant pour Linux embarqué me semble être la meilleure idée, à la condition que les deux salons soient très proches (il aurait été possible d'avoir une continuité physique, les locaux sont prévus pour à la porte de Versailles !), ou alors qu'ils ne tombent pas aux mêmes dates, comme avant. Dans ce workshop (sur le salon RTS, s'entend, il faut que cela reste gratuit), il serait idéal d'adresser toute sorte d'intervenants, de milieux divers (industriels, CE, M2M, comm', etc), des enseignants et formateurs (quelques uns se baladaient sur le salon, ai-je appris sur le stand de Neomore), des libristes (pourquoi pas aussi des gens du monde BSD, eux aussi ont des choses à apporter à l'embarqué ! Soekris était d'ailleurs présent cette année encore sur SL), des entreprises de type intégrateur ou de service (c'est ici que peut entrer Linagora, outre l'aspect formation et juridique), en plus des habituels éditeurs, et enfin, élargir le scope avec du juridique (licences et brevets) ; je rêve d'un village associé à un cycle de conférence techniques ; et de retours d'expériences qui forgent des liens entre visiteurs (et pas seulement entre exposants et visiteurs), d'autant que Linux s'embarque sur des appareils tellement divers et spécifiques qu'il est toujours très intéressant d'en embrasser une vue la plus globale possible.

Concernant la diffusion de Linux et bien plus encore celle du logiciel libre dans l'embarqué (on pense aux méga-stars que sont gcc et Eclipse : on les trouve partout, soit bien plus encore que notre kernel favori), on peut dire que l'évolution atteint une sorte de vitesse de croisière : ceux qui attendaient pour migrer l'ont presque tous fait, et les nouveaux projets peuvent choisir parmi une gamme de solutions complète, où Linux prend une place importante, mais en dehors de tout effet de mode et de tout engouement irréfléchi. De nombreux partenariats ont été formés avec les principaux éditeurs de BSP, Montavista, WindRiver et Sysgo, de telle sorte que les fournisseurs de hardware peuvent répondre aux attentes de leurs clients, manifestement mieux informés qu'auparavant (cinq ou six ans que l'on évangélise, aussi). Cependant, le logiciel s'est trouvé de fait dans un certain recul -- je compte de tête cinq stands dédiés au soft "génériques", c'est-à-dire outre le spécifique de contrôle-commande ou d'analyseurs --, assez important même par rapport aux années précédentes, de telle sorte que j'ai bien peur que les acquis des années précédentes ne se perdent, d'autant que l'évolution du libre et du monde du CE est rapide. Sur les stands, on a souvent avoué un manque d'expertise dans les domaines que nous adressons, et il faut ajouter à cela les demandes en formation comme en renseignements juridiques solides. Il faut cependant bien se rendre compte de l'inertie toujours flagrante du milieu, fonctionnant selon une certaine logique de "cercles de confiance", et même si les accueils reçus étaient toujours chaleureux et intéressés (y compris à des endroits que je ne soupçonnais pas, comme le concepteur de fonds de panier PolyRack), nous verrons combien d'affaires peuvent nous être adressées...

J'espère cependant qu'elles seront assez nombreuses pour me permettre de justifier de nouveau deux jours et demi de visite sur les salons, mais aussi faire exploser le chiffre d'affaire du pôle embarqué, dont une commission me sera évidemment reversée (pas vrai patron ? ;)  ). Plus sérieusement, les retours seront certainement à mesurer d'ici les six prochains mois (j'ai déjà reçu un coup de fil, mais pas d'affaire sur le court terme), espérons simplement de leur positivité, en attendant de se faire encore mieux connaître. À noter cependant une évolution des mentalités avec une attention particulière portée au TTM, pour lequel Linux peut battre des records pour peu que l'on soit bien entouré ; cela rejoint clairement le sentiment dégagé lors du salon ARM. J'ai oublié de prendre des photos, cette fois-ci, d'ailleurs. On attend à présent les slides des conférences, pour information ARM m'a envoyé celles de leur salon sur CD-Rom, disponible à mon bureau.

Il n'y a plus qu'à remercier encore une fois les différents organisateurs des deux salons pour cette édition 2009, et donner rendez-vous à tous pour l'année prochaine !

mardi, novembre 25 2008

ARM European Technical Conference

J'ai pu assister toute la journée de jeudi 20 novembre à la conférence européenne de ARM, qui se tenait à Paris, tout prêt de la tour Eiffel. Le programme était lourd et a priori fort intéressant et les partenaires nombreux et de qualité. Je ne connaissais absolument pas ce rendez-vous de l'informatique embarqué, dont je me demande même s'il a lieu toutes les années en France (j'aurais dû demander, certains étaient manifestement des habitués de l'événement) ; en fait, c'est par le biais d'OK-Labs que j'ai appris l'existence de cette manifestation. La rencontre s'est déroulée depuis le matin, vers 9h00 (je suis arrivé à peine plus tard) et a duré jusqu'à 18h45 environ ; j'ai pu assister à cinq conférences techniques.

A mon arrivée, je me vois offrir, outre un porte-badge plein de poches pratiques, un sac en tissu simple contenant déjà quelques tracts et un programme de la matinée (les sessions sont nombreuses, quatre à chaque fois, et on rappelle sur le badge quelles sont celles pour lesquelles on s'est inscrit), mais surtout, un sac pour PC portable à deux grandes poches, très pratique et de fort bonne qualité : on ne se moque pas du monde, chez ARM ! L'organisation sera parfaite de bout en bout, enfin si j'avais pu savoir où rendre ma feuille de sondage d'opinion à temps j'aurais pu participer au tirage au sort, dommage (de manière fort amusante, je remarque que près de deux goodies sur trois à gagner tourne sur du Linux embarqué !). Parlons donc rapidement, puisqu'on y est, du repas : asiatique ou crustacés (même... des huitres !), j'aurais été subjugué par la fontaine à chocolat : il faut absolument penser à donner une prime à la dame qui a impulsé l'idée !  :)

Je fais un premier tour rapide sur les stands avant d'arriver enfin aux premières conférences communes (outre les cinq techniques, donc) : je n'avais pas imaginé que le nombre de participants serait si grand ! D'ailleurs, comme il y a finalement assez peu de temps libre pour y passer -- trois fois quarante minutes, grosso modo -- je n'ai malheureusement pas pu aller sur tous les stands, dommage. Je commence donc véritablement avec une première intervention de NXP (Geoff Lees, lis-je sur mon programme, je n'ai malheureusement pas eu de slides des interventions -- en fait je me demande même s'il y avait un moyen de les récupérer, peut-être ai-je rêvé --, mais j'ai envoyé un mail au contact ARM pour savoir s'il était possible de les obtenir : on devrait me les envoyer par CD ! :)  ), "The ARM Microcontroller (R)evolution" ; NXP vise à obtenir une rétrocompatibilité binaire parfaite entre ses MCU sur base ARM, je ne sais pas si c'est une si bonne idée (les casseroles du x86 ?), mais en tout cas ça révèle quelque chose que l'on reverra souvent : moins on fait appel au développeur software (même pour une recompilation simple !), et mieux on se porte.

Il me semble d'ailleurs que c'est Semir Hadda, le manager du marketting de STMicroelectronics, qui a traumatisé l'assistance en affirmant qu'il fallait commencer le développement logiciel le plus tôt possible, car c'était là où tout se jouait, à l'heure du hardware peu cher et plus facile qu'avant à obtenir ; penser d'ailleurs à la phase d'optimisation software avant d'augmenter la puissance hardware. Le message est dans la même ligne que celui de Reinhard Keil, le directeur des outils MCU chez ARM, avec sa conférence "ARM Microcontroller: Strategic view". Il ressort de tout cela que les acteurs en ingénierie embarqué sont par exemple intéressé à 70% par des outils de débuggage performants, et ce avant même la considération des performances et de la robustesse des produits : on sent le time to market et la solidité des développements softwares devenus de plus en plus complexes au coeur des attentes -- et des craintes ? -- des différents acteurs.

D'économie de marché, il en a été fortement question avec l'intervention de Malcolm Penn, le CEO de Future Horizons, qui avec "Vision 20:20... Designing Tomorrow's Systems Today", nous a expliqué qu'il a déjà vu des crises, que c'est cyclique, et que l'on est effectivement en train de plonger -- ça coupe avec l'optimisme affiché des précédents intervenants, avec leurs graphiques tous exponentiels !  Il n'y a pourtant pas de quoi s'inquiéter, apparemment : si des gros ont déjà disparu par le passé, cela peut toujours arriver maintenant (j'apprendrai plus tard que Atmel a eu chaud, récemment : pourtant leurs produits sont réputés excellents !), mais le marché survit et se restructure (on dirait presque du Friedman avec une touche de pragmatisme, mais on n'en sort pas bien rassuré tout de même). Il nous entretient ensuite de l'importance capitale, à ce niveau, de la R&D : celui qui ne suit pas meurt, c'est aussi simple que cela, et il faut à l'heure actuelle deux à trois ans pour sortir quelque chose de viable. C'est-à-dire que si une société s'avise de couper dans le budget de l'innovation sur ses MCU, à la nouvelle génération, soit deux à trois ans plus tard (durée qui tend à s'allonger, ce qui représente un problème pour l'arrivée de nouveaux concurrents), cette société disparaîtra brutalement, alors que jusque là tout pouvait aller fort bien. Voilà un avertissement qui a le mérite d'être clair. Cependant il parle très vite (ça part dans tous les sens, d'ailleurs) et ses slides sont plein à ras bord, il saute beaucoup de choses, bref j'espère que l'on pourra retrouver quelque part son analyse et se pencher dessus.

Ainsi s'achève la première session de mini-conférences communes, vers 11h20 ou 11h30. Je peux donc commencer la visite des stands, et en fait le temps passe fort vite en compagnie des intervenants de Virtual Logix ; il faut dire que la paravirtualisation est toujours mon sujet favori, ce qui donne donc lieu à des échanges intéressants (nous parlons notamment d'une fonctionnalité avancée de redistribution à chaud de mémoire vive entre les différentes VM). Qui plus est, le positionnement de Linagora sur le marché peut tout à fait intéresser de manière complémentaire des sociétés proposant du logiciel très embarqué (l'hyperviseur est sous le noyau, avec des impacts au niveau drivers, on est loin du userland !), dont la spécialisation ne peut proposer aux clients souhaitant un système complet (j'ai déjà travaillé sur des projets avec des pages web CGI, par exemple : on peut aller jusqu'à un niveau assez élevé, en embarqué !), ce à quoi Linagora peut tout à fait répondre avec notre équipe d'experts en Linux embarqué. Il est 11h50 : l'heure de rejoindre le rez-de-chaussé (le principal du forum se passe au niveau -1 de CAP15) pour assister à la première conférence technique, menée par Nick Sampay : "Using trace to optimize system performance".

On aurait pu croire à une présentation du debug software en utilisant sondes J-TAG ou autres moyens, mais en fait c'est du hardware dont il va être question, plus exactement de l'organisation des bus et buffers pour dumper registres et pipeline, jusqu'à une éventuelle sortie sur port J-TAG. On est très enfoui, et même si c'est intéressant, un certains nombre de personnes quittent prématurément l'assemblée en se rendant compte que ce n'est pas pour eux ; ce n'est pas vraiment pour moi non plus, mais l'aspect de culture générale n'est pas inutile. Dommage cependant que ce n'étais absolument software, peut-être aurais-je dû aller à "Optimizing Software using ARM tools - profile driven compilation", mais je pense que ça aurait été essentiellement de la publicité pour RVDS, et j'en aurai de toute façon eu pendant encore les deux sessions suivantes...

Durant la pause déjeuner, je rencontre un ingénieur de Trango Virtual Processors, et malédiction, comme un certain nombre d'intervenants, il n'avait pas ou plus de carte de visite, je ne me souviens donc déjà plus de son nom -- nous avons commencé à travailler en même temps pour la société, mais on avait dû se croiser que très rapidement, d'ailleurs j'ai appris que j'avais été le premier "extérieur" à travailler sur Trango, et le premier à expérimenter le développement à distance. C'est l'occasion d'évoquer le rachat récent par VMware : il m'est confirmé que l'entreprise est à présent entièrement la possession du leader américain de la virtualisation (propriétaire), et n'entretient donc plus aucun rapport (déjà très symboliques) avec le groupe Elsys. La société voit cela comme une reconnaissance d'un très grand acteur du marché (c'est plus de 1600 personnes, VMware !) de sa solution, qui rappelons-le est codée à partir de zéro, contrairement aux autres compétiteurs du secteur (VLX et OKLabs se sont basés respectivement sur les microkernels ChorusOS et L4, quant à Sysgo ils ont récupéré leur kernel pour aéronautique PikeOS), lui assurant la plus petite empreinte mémoire (15~20Ko). C'est l'analyse que j'ai aussi faite ici-même.

Je rencontre aussi durant cette pause, et pour la première fois, l'équipe d'OK-Labs. Du moins la fort charmante Brenna Walters, venue tout droit du bureau de Chicago (mais elle est originaire de LA, pas tout le monde n'est australien chez OK-Labs, manifestement !), qui s'occupe justement de la communauté Open Source. Et distribue les T-shirts "I run in privileged mode", phrase d'un humour hautement geekesque... inspirée par elle-même ! Evidemment, nous parlons boutique, puisque mon ancien stagiaire a travaillé durant six mois sur leur produit OKL4, un hyperviseur de paravirtualisation que l'on aura pu tester, comprendre, et pour lequel Linagora aura montré son intérêt et son investissement actif dans la communauté (ML, wiki d'aide, etc). Et puis Abi Nourai, qui prend la direction technique en Europe, à Vélizy (avenue de l'Europe, justement, côté Auchan pour situer), mais qui avait quelques rendez-vous toute la journée : je n'ai donc pu le croiser que fort rapidement à ce moment-là, et ce n'est que plus tard que nous aurons eu la possibilité de faire plus ample connaissance.

En attendant, l'après-midi débutant, c'est à la conférence "Moving to 32 bit MCUs and High Level Programming" que je me suis rendu, la présentation étant toujours assurée par Nick Sampays de ARM.Nous parlons en réalité uniquement de ce que propose Keil pour ce faire. En fait, cette compagnie rachetée en 2005 concentre à présent les outils de développement pour ARM, et on passe donc en revue MDK (Microcontroller Development Kit), avec son compilateur RealView (que je connais fort bien : j'ai eu l'occasion de travailler dessus, pour Trango justement -- et NXP indirectement --, et j'ai entièrement lu les centaines de pages de documentation autant de armcc que de armlink et leurs autres logiciels de la suite), son IDE µVision (qui de base n'a rien de bien original, mais présente des aspects très intéressants : chargement de code sur cible via J-TAG ou simulation du device en deux clics -- avec débuggage facilité --, options de compilations en clickodrome, couverture de code avec statistiques d'exécution, ou encore un analyseur logique qui présente des graphes dans l'idée d'un oscilloscope), sa bibliothèque C avec son pendant très allégé Microlib (on est dans l'idée de la µClibc, mais on annonce 92% de réduction d'utilisation mémoire !), et enfin le câble J-TAG ULINK2. Une grosse page de publicité qui dure 40 minutes, comme toutes les conférences techniques (et non commerciales :)  ).

Problème : il semblerait que au moins µVision (et peut-être les autres logiciels ? Pour RVDS, je sais qu'une version Linux existe, puisque je l'avais) ne soit disponible que sous Windows, en fait on ne parle même pas de l'OS d'accueil, et très généralement tout le monde présente des outils sous Windows dans les stands et les communications (à noter que OKLabs n'utilise que MacOS X, et que Trango est sous Ubuntu). Aussi, Reinhard Keil (mince, de la société Keil, je comprends mieux pourquoi c'est le directeur !) lorsqu'il nous présente la conférence suivante est aussi Windows-centré (on aura même droit à un soft pour éclairer/éteindre des LED d'une carte de dev, compilé en Visual C++... Berk). "ARM Real-Time Library: Facing Embedded Technology Challenges" était alléchant pour la même raison qu'un peu tous les acteurs en R&D embarquée recherchent des outils déjà existants pour réduire le fameux TTM (c'est après les outils de debug l'une des plus importantes attentes). En fait, on va nous parler de RTX, le mini-noyau temps réel de ARM/Keil. Libre de toute royalty, et pesant entre 1,5 et 5ko tout dépend de ce que l'on y met dedans, c'est l'occasion de renouer avec un monde industriel où le hardware est toujours roi : explication de ce que sont UDP et TCP (avec différences), d'Ethernet (avec connexion par PPP, SLIP et dial-up), on évoque aussi les serveurs http avec CGI (quand je disais que c'est à la mode...), le telnet ou le TFTP, le SMTP ou DNS, bref des choses bizarres pour l'électronicien (raté, c'est bien connu), mais tellement standard pour l'ingénieur informatique je pouffe intérieurement de rire lorsque l'on présente cette révolution : "TCP network provides easy solution to connect to the world". Ca remet les idées en place. RTX fournit un file system pour flash (RL-Flash), un support des différentes piles USB par RL-USB (HID/MSD/Audio, l'occasion de présenter rapidement cette grande avanceé qu'est l'USB...), et même un support du bus CAN (RL-CAN, on l'aura deviné). Possibilité d'obtenir les sources dans la version deluxe que l'on imagine plus chère, à l'exception de la pile TCP/IP (toujours la partie sensible...). Je rêve d'une comparaison de tout cela avec RTEMS.

45 minutes de pause, je passe par NXP qui présente sa série LPC (IDE sous Windows) avec un anglais néerlandais qui n'invite pas trop à s'attarder, puis je vois Texas Instrument, et c'est la révélation. Car TI (France, à Villeneuve-Loubet, près de Nice, mais ma première interlocutrice Marie-Claire Desjardins, dénuée de carte de visite, m'a bien dit venir de la banlieue parisienne) n'est pas seulement très intéressé par Linux embarqué -- et sur leur stand, une télé diffuse justement les applications graphiques lancées sur une carte : ce qui les attire, c'est le communautaire ! Aussi peut-on lire en cinq pages un document "TI Linux and Open Source Initiative Backgrounder", et pour bien montrer leur engagement, une carte de développement à base de ARM Cortex-A8 est présentée : cette carte n'est pas banale puisque ses spécifications sont entièrement ouvertes, dans un projet communautaire, pour un mini-prix de 149$. En revanche, pas de port Ethernet et un seul USB OTG (on-the-go, c'est-à-dire qu'il peut tout faire, host, target ou audio), mais en échange une sortie HDMI/DVI et une autre S-Video : c'est que l'on peut faire de la 3D avec ce genre de MCU. En effet, les OMAP font partie des choses fabuleuses que l'on peut rencontrer dans l'embarqué (j'ai travaillé moi-même sur le Sagem MO300e, toute la partie système Linux "distribution maison" vient de moi, sur un OMAP730, d'après la photo de famille) : à présent la série des OMAP35x est considérée comme quatre fois plus puissante que la génération précédente des ARM9 (cadencés jusqu'à 450Mhz, mais chez OMAP, on est passé directement aux ARM11 à 330Mhz), et quand on pense qu'avec les 200Mhz de mon processeur je faisais booter en dix secondes un Linux 2.6.19 virtualisé avec un nucleus, noyau Linux qui démarrait dans sa séquence d'initialisation un serveur http (lighttpd) et un autre ssh (dropbear), on imagine alors les possibilités de ce Cortex ! (il va certainement conquérir le monde) Je repars avec beaucoup de documentation (disponible à mon bureau).

L'échange avec TI fut des plus enrichissants, et partageant des visions communes, j'espère très fortement que nous pourrons travailler ensemble. D'ailleurs, ce type de partenariat entre fournisseur hardware et développeurs software pouvait se rencontrer à peine plus loin, sur le stand d'Antycip, qui ne faisait pas que montrer ses belles cartes de développement professionnelles (prévoir de la place pour en stocker une !), mais faisait aussi la publicité de Montavista, dont on ne distribuait pas seulement des yoyos lumineux (avec un système de dynamo : ça c'est goody !) : la plus célèbre des sociétés en Linux temps-réel est en effet recommandé et présentée sur les stands d'Anticyp comme leur intégrateur de Linux embarqué/RT de préférence, et vice-versa. Leur solution de développement et d'intégration sous Eclipse (qui reste un "must-see" : en quelques clics, on se construit un file system complet !) bénéficie par ailleurs d'une diffusion sur écran plasma géant. Cela me donne l'occasion de parler de stratégies (d'alliances, de partenariats), de perspectives (on me confie qu'en réalité le gros du chiffre d'affaire est effectué par la vente massive à des clients très nombreux de microcontrolleurs de faibles performances, et qu'en fait le nombre d'acteurs sur des secteurs tels celui concernant l'ARM Cortex-A8 est très petit, mais cela est compensé par la diffusion massive en millions d'exemplaires des solutions obtenues, eu égard au type d'applications visées), d'état du marché (certains ont eu très chaud cette année, comme je disais plus haut). Malheureusement, encore un qui n'avait plus de cartes de visite, mais il aura eu la mienne (très... artisanale, c'est vraiment la crise pour tout le monde :)  ). Je me précipite alors, avec un peu de retard, à la conférence sur "Software driven low power optimization for ARM mobile architectures/Multimedia processors power management".

Le premier intervenant est de la société Synopsys (intéressant comme nom !), mais je n'ai pas pu noter son nom (en revanche son prénom est Markus) ; il nous préconise de démarrer le développement logiciel as soon as possible (on continuera tout le temps à parler anglais, même lorsque les intervenants sont francophones : il y a toujours quelques personnes dans la salle qui ne le sont pas, tandis que tout le monde parle anglais ; on y repensera très fort la prochaine fois que l'on médira sur notre système scolaire), ce qui ne va pas sans traumatiser les décideurs hardware, mais c'est ainsi : il nous montre avec une courbe que si l'on démarre tôt, on aura le temps, après avoir ajouter des fonctionnalités demandées qui vont charger la mule (soit le CPU), d'optimiser cette partie software, et ainsi de ne pas avoir ni à augmenter la puissance du hard, ni à perdre en puissance disponible (tant en terme de calcul que de durée de batterie). Je ne peux qu'approuver, et il ajoute même que "Software rules power consumption", voilà qui a le mérite d'être clair. Il vante en outre les mérites de la simulation, et donc du profiling. Marie-Claire Desjardins, de Texas Instrument (Engineer, pas commerciale), nous parle ensuite de "the flexible dynamics of power management in multimedia processors", et nous démontre encore en deux coups de cuiller à pot que TI est très impressionnant dans son domaine. On nous présente le système TI SmartReflex, qui permet de diminuer à la volée le voltage pour diminuer les pertes (dynamic voltage and frequency scaling -- DVFS -- et l'adaptive voltage scaling -- AVS), et dispose de deux systèmes complémentaires : le Dynamic Power Switching (DPS, on arrête ou réduit des parties lorsqu'elles sont inutilisées, avec une détermination à chaud) et le Static Leakage Management (SLM, on met le processeur dans un état de veille prolongée en un clin d'oeil, afin de prolonger pendant plusieurs jours la durée de vie de la batterie : c'est ce que l'on trouve par exemple, à mon avis, sur le N770 dès lors que l'on referme le clapet). Ces technologies avancées sont disponibles sur l'OMAP35x, ce qui prouve que je ne disais pas des bêtises en le qualifiant de merveille de l'embarqué. On trouvera sur le sujet (avec des graphes identiques) des papiers sur powermanagementdesignline ou son équivalent pdf sur ti.com.

Il est alors l'heure de passer à la dernière conférence, sur la paravirtualisation. La première partie est assurée par le fraichement nommé European Technical Director d'OK-Labs Abi Nourai : "design a better feature phone with paravirtualization". Son propos est simple, et c'est celui que je soutiens depuis de années pour ma part : l'augmentation des fonctionalités attendues par les appareils est en constante augmentation, à tel point que l'on en arrive à des OS de type "desktop-like", tels MacOS (iPhone), Windows (Mobile/CE) ou Linux. Et aussi à une attente d'ouverture (possibilité de configurer/rajouter des fonctionalités propres à l'utilisateur), qui ne va pas sans impact au niveau de la conception software (il serait facheux, par exemple, puis-je préciser, qu'un utilisateur lambda de téléphone puisse transformer son appareil en brouilleur). Aussi, nous sommes partis de systèmes d'exploitation simples, et à présent ils sont très sofistiqués. Cependant, les piles de communications représentent de gros investissements, et le re-engineering augmenterait de facto le Time to Market, ce que l'on ne peut jamais se permettre. La solution est alors de faire appel à la paravirtualisation (ou comment ménager la chèvre et le chou dans deux espaces mémoires séparés). OKL4 est alors rapidement présenté -- on évoque rapidement sur les slides le trop peu connu FASS (Fast Adress-Space Switching : je ne trouve pas de lien probant sur le net, c'est toujours une galère sans nom de trouver des informations dessus !), mais on n'ira pas aussi bas dans le discours. Ce qui est certain, c'est que OpenKernel Labs attaque fort niveau stratégie : plus de 200 millions d'appareils (devices) contenant leur solution actuellement distribués, ils tablent sur 250 millions à la fin de l'année, notamment grâce au HTC Dream (G1) qui fait tourner un Linux Android ! Ils ont de plus une "agressive roadmap" (je me mets à parler franglais, c'est pour ma future carrière de commercial) pour la preuve formelle de sûreté de fonctionnement ("correctness", c'est moins fort que la sûreté peut-être, mais comme rien de précis n'a été indiqué... On peut penser à EAL 5 ou 6). OKLabs se définit actuellement comme le leader du marché.

C'est alors au tour de Jean-François Roy de Trango (déjà rencontré sur le salon RTS 08, il est entré après moi chez Trango, je n'ai donc jamais travaillé avec lui, contrairement à Pierre Coulombeau ou Bruno Zoppis, qui s'occupaient avant des salons français, et sont manifestement devenus globe trotters hors France à présent : Trango a d'ailleurs une entité d'une vingtaine de personnes aux USA, soit une bonne partie des salariés de la société !) : si avant la dernière conférence de la journée chacun disait expédier sa présentation en largement moins de 20 minutes, finalement ils mirent chacun une bonne demi-heure. Pourtant, "achieving drivers portability through platform virtualization" (hhmm, driverS ?) ne parla pas technique, du moins on a juste évoqué les possibles répercussions à la fois sur le code -- le plus petit du marché, 20 à 30 Ko -- de Trango ou sur celui du noyau qui doit utiliser la mémoire partagée par ledit driver pour récupérer des piles ou autres, sans énumérer lesquelles. En fait, on a plutôt parlé du pourquoi d'une idée aussi saugrenue (GPL, ABI d'un pilote fermé qui n'est plus en adéquation avec celui d'un nouveau kernel), et de ses mérites logiciels, comme l'indépendance à l'OS ou l'invulnérabilité de celui-ci à un crash éventuel du driver, porté hors noyau (on évitera ainsi un panic/Oops sous Linux). On insiste en tout cas surtout par le rachat récent par VMware, datant du 14 octobre (et rendu public le 10 novembre), d'ailleurs toutes les slides ont migré sur le modèle bleu ciel VMware !

C'est ainsi que s'achève cette journée du ARM European Tecnhnical Conference. Enfin, je fais tout de même un dernier tour des stands, et comme je discute avec un ingénieur d'Adeneo, qui serait notre concurrent direct en terme de développement et intégration spécifique de Linux embarqué (mais dans une optique SSII forfait/prestation à 70%/30%, proche de l'industrie lourde, essentiellement basé à Lyon et un peu à Massy, pour ce que j'ai compris), je rate le tirage au sort. Je termine ma soirée en compagnie d'Abi et Brenna d'OKLabs, qui aurait bien bu une bière avec moi (ou plutôt un lait-fraise pour ma part), mais j'avais malheureusement quelqu'obligation : ce n'est que partie remise ! En tout cas, nous avons fait deux photos que j'espère pouvoir récupérer et publier ici-même. Très, très bon contact avec nos amis d'OKLabs, ce qui confirme la fort bonne impression des précédents entretiens téléphoniques et par mail que nous avions pu avoir ; j'espère que nous pourrons un jour proche travailler sur des projets communs.

En conclusion on peut remercier amplement (ce que j'ai déjà fait là-bas et pas mail) l'équipe organisatrice de ARM, et j'ai pour ma part gardé le ARM bag (mieux qu'un handbag ! :)  ). J'ai été surpris par le très bon format de l'événement, finalement on aurait fort bien pu y emmener notre PDG, mais je ne pouvais pas le savoir avant ; peut-être pourrions-nous y exposer l'année prochaine, les stands concentrés sur le logiciel pur étaient peu nombreux mais tout de même présent, c'est à voir, donc (dans tous les cas, je ne pense pas qu'une exposition à RTS soit souhaitable, par exemple : l'événement aura lieu strictement en même temps que solution Linux, à quelques mètres de là ; en revanche je vais relancer le responsable des conférences). Il est seulement regrettable de n'avoir pas eu assez de temps, avec les conférences, pour faire le tour de tous les stands (comme le montre la dernière photo prise juste à la sortie d'une conférence, les rangées étaient plutôt vides durant celles-ci, alors qu'il était difficile de se déplacer pendant les pauses avec l'assistance très nombreuse). La documentation rapportée a déjà pu être redistribuée à ceux qui ont montré un vif intérêt (celle de TI pour l'instant remporte le plus de succès ; je pourrai en outre mettre à disposition le CD avec les slides dès sa réception), et certains contacts pris (ou repris) mèneront je l'espère à des relations privilégiées. Si l'on ajoute que les conférences et la prise de température générale du secteur ont pu enrichir mon point de vue sur la situation actuelle, je pense que cette journée de visite fut une expérience des plus réussies.

vendredi, juillet 4 2008

salon RTS 2008

Voici donc que l'ouverture des blogs linagoresques (?) me permet enfin de faire partager mon compte-rendu du salon RTS (comme Real Time System) que j'ai arpenté au tout début d'avril, sur un jour et demi, en compagnie tout d'abord de mon stagiaire Rémy le premier après-midi (pour une conférence sur son sujet de stage, la paravirtualisation avec OKL4), tandis que le lendemain était consacré à une visite des stands et à la conférence sur le libre dans l'embarqué, en compagnie de l'autre stagiaire du pôle embarqué, Johana Bodard.

Le salon du Temps Réel de cette année 2008 était donc de retour à la porte de Versailles après un passage prolongé plusieurs années de suite (deux ou trois) au CNIT ; mais cela ne pouvait pas masquer un très net ralentissement, toujours plus en progression : cette fois, les deux salons Display (affichage numérique) et M2M (Machine to Machine, communication entre matériels distants) étaient totalement fusionnés, alors qu'en 2005, on pouvait voir des imprimantes 3D dans un hall bien séparé. À cela, plusieurs explications comme le coût des stands de plus en plus inabordable, surtout en comparaison des retombées, mais aussi peut-être le fait que le secteur se stabilise, ou plutôt se cristallise. En ce sens, certains acteurs du temps réel comme Dolphin ou Concurrent Computer n'étaient présents qu'à Solutions Linux, et plus à RTS. Une seule enseigne majeure était de retour, Montavista, tandis que beaucoup d'autres ont disparu ou fusionné : Polyspace (vérification formelle de code) a été englobé par Matlab ; Systerel (sécurité et certification) se trouvait sur le stand de Sysgo. Trolltech (venant d'être racheté par Nokia pour sa technologie Qt parfaitement adaptée à l'embarqué), Jungo (et ses piles horribles), ou WindRiver (qui a apporté... un flipper) se trouvaient sur un second mini-stand du revendeur de cartes embarquées Neomore, qui avait oublié d'apporter son produit pas cher pour démo, la gamme Embest.

Les stands n'étaient pas bien folichons non plus : fini les animations chez Ecrin, qui n'a pas même apporté ses cartes VME (le concurrent Gaci était tout simplement absent, pourtant l'année dernière les offres groupées hardware et software fleurissaient), WindRiver ne distribue plus de chocolat (et les sacs distribués à l'entrée sont à l'effigie de SFR/3G+), même Arion a laissé tombé sa démo très visuelle de l'année dernière. Seul Greenhills tire son épingle du jeu : immense stand, présentations interactives de leurs différents produits avec mini-conférence toutes les deux heures, distribution de documentation papier et clé usb (256mo, avec cordon !), le luxe comme à la belle époque, image très dynamique renvoyée que l'on aurait aimé plus voir.

La visite du salon s'est faite en deux temps : lundi après-midi, et jeudi entièrement. Première étape en compagnie de mon stagiaire : conférence paravirtualisation et embarqué, avec présents et dans l'ordre Trango VP, Virtual Logix, puis Greenhills et son IntegrityPC, et enfin Sysgo avec PikeOS. Les premiers sont bien connus de ma personne : j'ai travaillé pour eux, et bien avant l'ingénieur qui a fait une présentation honnête, mais assez peu précise, quant aux mérites techniques de la solution (certains points sont très commerciaux et masquent une réalité plus simple, inversement) ; les seconds peuvent se vanter d'être les premiers à équiper une solution commercialisée "grand public" (comprendre : pour développeurs...), avec le Purple phone, sur base hardware de chez NXP (fork de Philips ; à noter une citation de RTK-e, apparemment le nom de leur noyau interne n'est plus tabou, on se rappelle que j'avais voulu le rajouter à la liste des OS sur wikipedia sans succès il y a deux ans) ; Sysgo fait son chemin, comme ses "camarades" précédents, la recherche de certification EAL de plus haut niveau possible (on parle plutôt de EAL5, voire 6) est dans les tuyaux ; Greenhills attaque fort, en revanche, certifications à gogo, expérience sur IntegrityOS (qui équipe les avions depuis de nombreuses années) oblige, mais si la solution marche par exemple déjà sur de la radio militaire portable, elle n'en reste pas moins réservée à du x86 (avec techno VT/Pacifica) ou PPC (voire PowerQUICC). Idée glanées par-ci par-là pour mon stagiaire (comme l'exécution sans recompilation d'application Linux virtualisée dans une sandbox émulée), qui travaille sur la seule solution majeure non ici présente, et Open Source (licence BSD) : OKL4 d'OK-Labs (base noyau L4).

La seconde conférence intéressante était le jeudi matin, Open Source et embarqué, assistance nombreuse, plus que pour la paravirtualisation, et un rapide coup d'oeil dans les salles d'à côté montre le succès très large de ces deux prestations contrairement à toutes les autres, prouvant de facto où se porte toujours l'intérêt du Consumer Electronic (CE) à l'heure actuelle, puisque l'année dernière c'était la conférence Linux qui remportait le plus de succès, et la partie paravirtualisation le plus d'intérêt porté. Mandriva ouvre le bal avec son PDG, au franc parler et à la fluidité sans pareille, mais au discours assez éloigné de ce que l'on entend trouver à un salon comme RTS ; puis Montavista avait des choses à dire, mais le sympathique orateur avait du mal à s'exprimer, dommage, informations intéressantes en tout cas, quoique non révolutionnaires ; CIO informatique, la sympathique petite boîte du Sud qui ne fait plus que du Linux embarqué (et croûle sous les demandes... à leur échelle), a recentré le débat sur ce qui en est effectivement au coeur, les attentes des industriels, les erreurs à ne pas commettre, l'importance du juridique. Sur ce point, Adacore (je demandais justement l'année dernière à l'un de mes amis comment il se faisait qu'ils n'étaient pas là) se permet de corriger, notamment sur le fait que même condamné après une violation de GPL, il n'y a pas obligation à redistribuer les sources internes ; le point est fin (mais l'exposition à la limite du troll), et la présentation aussi dynamique que commerciale cache les raisons jusqu'à la séance des questions : l'obligation est de faire cesser le litige, c'est-à-dire qu'il reste toujours le choix de retirer le produit et ne rien diffuser, et assumer le coût que cela implique. Il faut relever le grand mérite de cet éclaircissement : une licence libre n'est pas plus ni moins complexe qu'une licence propriétaire (enfin si, elle est souvent plus claire), du moins elle comporte comme toujours des possibilités et des obligations ; prendre ce qui intéresse (gratuité et disponibilité des sources, absence de royalties à la distribution du produit), et ignorer les contre-parties demandées (redistribuer les sources GPL avec les binaires par exemple) est équivalent à pirater n'importe quel logiciel propriétaire, ni plus ni moins ; et si l'on n'est pas content, il n'y a qu'à voir ailleurs, le monde est assez vaste. J'applaudis des deux mains cette position, que j'exposerai encore plus précisément et avec appui à mes élèves, qui prennent la question beaucoup trop à la légère (et pourtant avais-je déjà bien insisté), comme tous les ingénieurs déjà en poste, dont le hobby principal est de se tirer des balles dans le pieds.

Sur les stands, on peut voir une démonstration impressionnante d'un outil de débug par génération automatisée de test cases unitaires dans la suite Rational d'IBM (l'outil provient en réalité d'un rachat d'une société Française, tandis que le reste de la suite, de Lotus à Clearcase, est toujours aussi moche). Dspace montre quelque chose de similaire dans l'idée, mais pour Matlab. Ces derniers ont enfin une vraie version Linux potable, et Simulink marche aussi, enfin, il n'y a rien pour le prouver sur le stand. Anticyp et Neomore sont les seuls vendeurs de cartes à base ARM ou xscale. WindRiver (qui nous parle du dernier Intel consommant 4W, mais dont la carte de dev comporte un ventilo, paraît-il vraiment inutile) ne fait plus la publicité de Linux à grands coups de pingouins, mais Sysgo non plus, alors que cela reste leur principal produit d'appel ; d'ailleurs le système de navigation de BMW (contenu dans la radio, chip PPC) a migré sous Linux récemment, et est déjà commercialisé ; les autres produits chez les différents constructeurs, toujours sous VxWorks, devraient suivre (depuis, on l'a vu, c'est le chemin de la paravirtualisation qui a été choisi par WindRiver). Trolltech a fait venir deux Français de Norvège faire la promotion de Qt for Embedded, nouveau nom de la branche Qtopia sans le support téléphone (mais présenté sur... des téléphones Neo en place d'OpenMoko, Milo de Sony toujours sous Linux, et HTC sur WinCE), et distribuait les goodies aux gens sympas tels que nous (du chauffe-tasse usb à la house pour portable). Très intéressantes discussions, surtout que notre deuxième stagiaire du pôle embarqué (une fille, en plus ! ;)  ) travaille (ou veille technologiquement) sur OpenMoko, Android, et la téléphonie mobile sous Linux en général. Et en se promenant entre les stands, le logiciel libre d'émulation qemu a très clairement le vent en poupe, impressionnant lorsque l'on connaît ses conditions de développement !

Cela contredit tout de même quelqu'avis de professionel des coprocesseur et ancien professeur (trolleur dans l'âme, à vrai dire) nous affirmant sur son stand que Linux, bien du monde en était revenu ; non pas qu'il soit en faveur de WinCE (complètement disparu, cette fois, juste une ou deux mentions sur l'ensemble des stands, l'époque de l'espace de formation gratuite dédié est manifestement révolu), mais c'est que sa vision du Temps Réel (et a fortiori de l'embarqué, qu'il assimile facilement, tandis que sa distinction "temps contraint" va même englober des applications pourtant critiques du militaire...) se limite à ce qui est "pur et dur", et comporte au finalement l'automobile (côté calculateur de bord), l'avionique, le spatial, et les communications ou calculs particuliers en interne aux industries, soient effectivement des milieux où Linux était pressenti sans que l'on sache trop pourquoi, et dont le retour à la raison n'est pas si étonnant. Ignorés sont de sa personne toutes les problématiques du CE : modems, routeurs, téléphones, etc. "Que ça"...

En réalité, Linux est entré dans le paysage, on ne se pose plus trop de questions à son sujet, il s'agit d'une solution tout à fait envisageable, parmi d'autres. Plus de folie ambiante, il semble au moins que sur ce point, la raison soit de rigueur. Reste à savoir le pourquoi exact de ce sentiment mitigé. La proximité avec les salons de bien plus grande envergure comme Barcelone (GSM) ou le CES de Las Vegas ne doit pas y être pour rien, RTS n'a décidément pas encore bien pris le tournant CE, ce que l'on peut d'ailleurs remarquer au niveau de nos grandes entreprises françaises (Sagem, Thales, et... heu...), qui peinent à se recycler et sortir d'un milieu purement industriel qui ne rapporte plus rien (vive les salaires dans le spatial, à Toulouse : division par 5 à 10 du facteur temps nécessaire à l'évolution du traitement). Reste des problèmes d'engorgement et de tâtonnement, toujours, sur ce sujet ; c'est ici que pourrait se jouer la bataille, et notamment la prise de positions stratégiques dans le milieu de l'embarqué sous Linux. En espérant que Linagora s'engouffre dans la brêche :).

Toute la documentation glanée est disponible à mon bureau (ou plutôt en dessous), dans le grand sac rouge. On peut se prendre à rêver aussi d'une participation un jour de Linagora en tant qu'éditeur (ou simple intégrateur) de solutions Linux embarqué innovantes, et pourquoi pas, montrer notre savoir faire et notre envie de se positionner sur ce marché, en compagnie des acteurs OpenSource déjà implantés (Trolltech, Sysgo, CIO informatique, AdaCore, Montavista étaient tout de même bien présents), qui finalement se complètent tous plus qu'ils ne se concurrencent réellement, alors que la demande ne cesse d'augmenter, mais plus discrètement qu'avant, et surtout, de manière toujours aussi désorganisée, à l'image de ceux pouvant y répondre, lorsqu'on y pense. A présent que l'on a le bazar, il serait de bon ton de construire une cathédrale  :).